« La Convention d’Objectifs et de Moyens (COM) illustre au plan régional cette volonté de se réinventer en étant un premier élément de cette restructuration construite avec l’État. »
Dans la continuité de la loi Pacte et du Contrat d’objectifs et de performance (COP) signé entre le ministère de l’Economie et des Finances et CCI France en avril dernier, les CCI d’Auvergne-Rhône-Alpes* viennent de signer avec l’Etat et CCI France une Convention d’objectifs et de moyens (COM) pour la période 2019-2021. Entretien avec Philippe Guérand, président de la CCI de région, qui revient sur ce changement en profondeur dans l'organisation des CCI.
Bref Eco : Vous venez de signer la deuxième Convention d’objectifs et de moyens (COM) de France. En quoi consiste ce document ?
Philippe Guérand : Dans le cadre de la loi Pacte, il vient fixer une feuille de route claire de notre activité autour de cinq actions qui seront financées par la taxe pour frais de chambre (TFC) : l'entrepreneuriat ; l’appui aux entreprises dans leurs mutations ; l'accompagnement des entreprises à l'international ; la représentation des entreprises ; et enfin l'appui aux territoires en contractualisant avec les collectivités dans le cadre de la loi Pacte. Chacun de ces axes sera décliné en indicateurs d’activité (taux de satisfaction, utilité, impact sur le chiffre d’affaires et l’emploi, taux de recommandation, etc.).
Dans un contexte de baisse importante et constante de la ressource fiscale depuis plusieurs années, les CCI d'Auvergne-Rhône-Alpes ont décidé de se réinventer pour être encore plus performantes pour les entreprises qu'elles appuient, les personnes qu'elles forment, les collectivités territoriales partenaires et l'Etat auprès de qui elles assument un rôle de corps intermédiaire.
Bref Eco : Quels ont été les effets de cette baisse de ressources ?
Philippe Guérand : A l'échelon national, nous sommes passés de 1,3 Md€ à 800 M€, entre 2015 et 2018, avec une projection à 400 M€ de budget en 2022. Nous allons donc perdre encore 100 M€ par an de recette fiscale. Au bout du compte, entre 2015 et 2022 nous aurons perdu 75 % de nos ressources fiscales. Cela n'a pas été sans conséquence, notamment sur l'emploi. Au sein de notre réseau régional, les effectifs sont ainsi passés de 2.000 à 1.700 personnes.
Bref Eco : Sur quoi ont porté vos économies ?
Philippe Guérand : Nous avons tout d'abord poursuivi le travail de mutualisation des services supports comme les RH, l'informatique, les finances, les achats… C'est un dossier déjà bien avancé. Ensuite, nous nous sommes attaqués à la mutualisation des services opérationnels en identifiant certains thèmes comme l'accompagnement à la création/transmission, ou encore l'accompagnement à l'international. La création de la « Team France Export » est un exemple concret de cet effort de simplification au service des entreprises de la région.
Nous avons aussi entrepris un effort considérable pour simplifier notre offre : nous avons aujourd’hui plus de 2.000 produits en catalogue. Nous souhaitons parvenir à une centaine. Les besoins des entreprises changent et notre catalogue se doit d'évoluer !
Bref Eco : Qu'en est-il de la formation qui occupe une place importante dans l'offre des CCI ?
Philippe Guérand : Nous gérons 21 campus sur la formation continue, trois grandes écoles de management de dimension nationale et internationale, 15 écoles consulaires généralistes ou spécialisées, et trois CFA au bénéfice de 35.000 personnes en formation continue, 12.000 étudiants et 14.200 apprentis. Nous travaillons sur de nouveaux business models pour le financement de ces différentes structures qui, à horizon 2021, ne se verront plus attribuer de TFC.
Concernant la formation continue, nous imaginons un dispositif basé sur un centre régional de ressources partagées. Le réseau des centres de formation des CCI d'Auvergne-Rhône-Alpes disposera ainsi d'une offre régionale commune, allégée, simplifiée et adaptée aux attentes des entreprises selon un modèle économique dégageant un résultat économique positif.
Au sujet des écoles consulaires spécialisées ou généralistes et en particulier les EGC (Ecoles de Gestion et de Commerce), la loi Avenir professionnel sur la réforme de la formation va impacter significativement les modèles économiques de ces établissements. Il s'agira, par des réorganisations ou des rapprochements entre établissements, de permettre, d'une part, de réaliser des économies d'échelles et de partager des ressources pédagogiques ou techniques et, d'autre part, de développer des formations plus rentables qui répondent aux besoins en compétences des différentes entreprises.
Bref Eco : Comment ce changement en profondeur est-il perçu dans les CCI territoriales ?
Philippe Guérand : Je suis confiant car nous avons, en Auvergne-Rhône-Alpes, des relations fortes entre les présidents de CCI et nous discutons de manière libre. Avec la signature de la Convention d’objectifs et de moyens, nous avons su créer avec l’Etat les conditions de transparence et de confiance pour réussir ce défi.
* La CCI de région Auvergne-Rhône-Alpes est un établissement public placé sous la tutelle de l'Etat et constitué de 120 membres. Son avec un réseau comprend 12 CCI territoriales et 1 CCI locale.