Peu représentées dans les médias, les dirigeantes veulent se donner plus de poids. Le Réseau économique féminin leur donne la parole.
Le Lyinc, ce club d’affaires privé lyonnais, n’a probablement jamais vu autant de femmes que ce 9 octobre. A l’occasion de la Quinzaine pour l’égalité Femmes-Hommes organisée par la Région Rhône-Alpes, le Réf (Réseau économique féminin) a fait salle comble en conviant trois femmes à débattre autour de la question : “Les Femmes dans la vie économique : les voir ou pas ?” Un titre quelque peu provocateur pour évoquer une réalité qui saute aux yeux : les femmes, qui représentent pourtant 52 % de la population française, sont nettement moins visibles que les hommes dans les médias. En 2013, elles ne représentaient que 20 % des intervenants à la radio et à la télévision.
Deux ans après cette étude du CSA qui avait fait grand bruit, et sur fond de loi Copé-Zimmermann visant à atteindre la parité dans les instances dirigeantes des grandes entreprises, on pourrait imaginer que les choses aient évolué dans le bon sens. C’est ce qu’a voulu savoir le Réf en étudiant de plus près quatre quotidiens nationaux en février 2015. Las. Le constat est sans appel : “Le déficit de représentation ne s’améliore pas”, fait remarquer Nathalie Brun, dirigeante de Khamsin-Conseil et responsable de l’association Sciences Po Lyon au féminin. Sur une semaine, les hommes occupent la Une dans 80 % des cas ! Et le déséquilibre est le même à l’intérieur des pages : les femmes prennent la parole dans 23 % seulement des citations du Parisien et de Libération (moins de 20 % dans Le Monde !). Et la situation est encore pire quand il s’agit des tribunes, interviews, chroniques ou éditos où l’on tombe, dans ces deux derniers cas, à environ 10 % ! Seule la rubrique “portraits” semble échapper, en partie, à cette sous-représentativité avec un peu plus de 40 % de femmes mises en lumière. Bref Rhône-Alpes, même en tant que partenaire des Trophées des Femmes de l’économie, ne fait sans doute pas assez non plus en la matière.
Ces chiffres ont fait vivement réagir les intervenantes. Pour Ondine Suavet, dirigeante de la start-up Mylight Systems qui a travaillé quatre ans dans la Silicon Valley et en Allemagne, “les femmes ont plus souvent un rôle modèle et des réseaux beaucoup plus forts aux Etats-Unis !” Faites le test : nommez dix chefs d’entreprise masculins… fastoche ! Et maintenant, dix femmes… Aïe aïe aïe ! Pour Claudia Stavisky, directrice du Théâtre des Célestins à Lyon, qui avoue avoir encore à prouver, au bout de quinze ans, qu’une femme peut diriger un théâtre, il faut “créer des rôles modèles !”
L’action du Réf, qui envoie des entrepreneures témoigner dans les collèges et lycées, lors de la Semaine de la sensibilisation à l’entrepreneuriat féminin, est un premier pas. Tout comme sa nouvelle démarche de proposer aux organisateurs d’événements des femmes expertes : “Les femmes ne doivent pas hésiter à se positionner en tant qu’expertes sur un sujet donné et pas seulement en tant que femme !”, conclut Ondine Suavet. Aux médias, maintenant, de leur donner la parole ! Dont acte.
Corinne Delisle
@corinnedelisle
Photo : ©Laurence Bosc-photographe.
Bref Rhône-Alpes Auvergne n° 2219 du 21/10/2015
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