En quinze ans d’existence, le lyonnais Evolem s’est fait un nom dans le capital-investissement. Avec une vision particulière de son rôle de financier : dans les entreprises dont il devient actionnaire, il injecte des capitaux à rentabiliser certes, mais veut aussi insuffler un esprit entrepreneurial, contribuant ainsi à définir, avec les dirigeants soutenus, une stratégie de long terme. Son propriétaire, Bruno Rousset, poursuit de cette manière l’expérience développée au sein de son propre groupe d’assurance, April.
Le portefeuille d’Evolem comprend aujourd’hui 35 participations dans des PME (hors April et ses filiales). Avec une activité en nette accélération : sur l’année 2008, le montant investi était de 13 millions d’euros ; il a été de 27 millions l’an dernier. Dans la même période, l’investissement moyen par participation est passé de 2 à 6 millions d’euros. De même, les entreprises visées sont plus grosses, avec un chiffre d’affaires moyen, à l’entrée d’Evolem, passé de 13 millions d’euros en 2008 à 23 millions en 2011.
Au-delà de cette montée en puissance, Evolem a entamé un vrai virage. “Le temps de l’actionnaire financier n’est pas toujours celui de l’entreprise”, explique Franck Urbanski, associé. Du coup, après avoir géré des fonds pour le compte de tiers, la société a préféré manœuvrer seule son propre navire. Fini les fonds. S’appuyant sur une force de frappe d’une centaine de millions d’euros, Evolem peut déployer librement sa logique. Celle du “no limit” : ses participations n’ont aucune contrainte de temps, car elles soutiennent des projets industriels autant que ses intérêts financiers.
Evolem se concentre sur quelques pôles d’activités : assurance, nutrition/santé, orthopédie, communication et marketing, environnement, équipement de la maison, distribution automatique. “Nous voulons constituer des groupes de référence dans chacun de ces métiers. Dans la distribution automatique, par exemple, nous sommes passés de 5 à 60 millions d’euros de chiffre d’affaires en trois ans, et nous serons bientôt à 140 millions”, explique Franck Urbanski. Chaque PME fait ainsi jouer toutes les synergies possibles avec les autres composantes du “groupe” Evolem. De fait, on voit se dessiner une stratégie qui pousse sa logique jusqu’au bout : “Dans les trois à cinq ans, nous céderons progressivement nos participations minoritaires (la moitié du portefeuille, ndlr) pour nous concentrer sur des participations majoritaires”, annonce Bruno Rousset.
A travers son approche humaniste de l’entreprise, ce serial entrepreneur suit une philosophie en rupture avec la finance ambiante. Réaliste : “Les financiers continuent à vendre du rêve et à jouer les croupiers d’un gigantesque casino”. Mais positif : “La vraie nature et le raisonnable finissent toujours par prendre le dessus. Je suis optimiste sur la capacité de l’homme à (…) triompher de cette crise de civilisation, de confiance et de responsabilité qui ne s’inquiète pas de l’avenir et des autres, où « après moi le déluge » devient le comportement de la normalité (1)”. Il remonte le courant. Il le sait.
Didier Durand
(1) Collectif : “Empreintes sociales, en finir avec le court terme” ; Odile Jacob, mai 2011.
Photo : L'équipe d'Evolem : "Nous sommes des entrepreneurs-investisseurs. La finance est un moyen, pas une fin", insiste Bruno Rousset.
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