Ils s’appellent “Où tu veux quand tu veux”, “Je n’irai pas sans toi”, “Cherche moi”, “Tout est permis” ou encore “L’orage gronde”. Drôles de noms pour des skis. Rien à voir avec les connotations techniques utilisées par la plupart des marques. Ici, dans le petit atelier artisanal de Saint-Pierre-de-Chartreuse (Isère), c'est créativité et passion à tous les étages, jusqu'aux appellations décalées des planches maison.
La fabrique du ski, c'est le rêve devenu réalité de Christian Alary, associé à sa compagne Raphaëlle Lavialle (80 % des parts à eux deux) et au studio parisien de design Arro (20 %). Cet ingénieur en mécanique n'est pas un inconnu dans le monde du ski : responsable “recherche & innovation” chez Rossignol (2001 à 2006), co-créateur de la société Kaorigin, puis de la marque américaine de skis RampSport dont il est toujours responsable R&D, il a passé deux ans au département innovation de Wedze (Decathlon). Et en 2014, c'est le grand saut avec La fabrique.
Positionnés sur le “haut de gamme à prix abordable”(1), les skis de la Chartreuse sont fabriqués selon une technique qui n'utilise pas de moules mais une table de découpe automatisée. Une particularité qui abaisse considérablement les coûts d'investissement et permet de multiplier les tests et ajustements de prototypes. Novateurs, ces skis le sont aussi par leur structure : leur noyau est en lamellé-collé de bambou (un bois très résistant, stable et extrêmement souple) alors qu'on utilise généralement du frêne. Se rajoutent les traditionnelles couches de fibres de verre, de polyamide (dessus) et de polyéthylène (semelle), enfin les carres (d'origine autrichienne).
Au terme de sa deuxième saison, l'entreprise a franchi un premier palier en se faisant une (toute) petite place dans le monde très concurrentiel des fabricants de skis(2). 100 paires vendues la première année, 150 la deuxième et 250 espérées l'an prochain : l'objectif serait de compter en milliers sur un marché annuel de… près de 400 000 paires. “Nous avons prouvé la pertinence de notre concept et nos produits sont très bien accueillis par la presse spécialisée. Nous vendons avant tout un comportement sur la neige, que nous proposons en test tous les week-end d'hiver en stations. Nous voulons miser sur la compétitivité et la performance de nos skis”, explique Christian Alary. Toutefois, la société approche d'un cap qui passera sans doute par l'arrivée de nouveaux actionnaires et de capitaux propres permettant de recruter. Bref, de passer du stade artisanal à une dimension plus industrielle, en s'attachant à une production locale : 70 % de la valeur des skis sont aujourd'hui réalisés en France.
Didier Durand
@didierldurand
Photo : Christian Alary et sa compagne Raphaëlle Lavialle
(1) près de 800 euros la paire avec fixations Rossignol.
(2) Outre les géants que sont Rossignol, Dynastar ou Salomon, Rhône-Alpes a vu naître un certain nombre de petits fabricants comme Aluflex, Bohème, Dupraz, Duret, Lacroix ou Zag.
Bref Rhône-Alpes Auvergne n° 2239 du 23/03/2016
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