Capifil réalise le gainage plastique de fils, filaments et autres fibres.
Virginie Laurencin
Quand la crise de la Covid peut faire basculer une entreprise, d’une situation désespérée à une dynamique insoupçonnée, grâce à l’imagination et l’engagement de ses collaborateurs.
C’est l’histoire à peine croyable de Capifil (Cras/Isère), redevenue ambitieuse après avoir frôlé la catastrophe. Une petite société industrielle familiale ; une dizaine de personnes dans l’atelier ; son dirigeant comme seul commercial ; une production (par extrusion) de tubes creux ou de gaines en plastique recouvrant des fils en acier de très petits diamètres, pour l’automobile : voilà, résumée, la photographie de l’entreprise que rachète Patrick Sivera en 2016, trois ans après avoir lui-même cédé Stiplastics qu’il avait dirigée trois décennies durant. Séduit par le savoir-faire des équipes et flairant un potentiel commercial peu exploité, il va rapidement engager une diversification de la clientèle, vers les travaux publics notamment.
Élan brisé… et rebond
Début 2020, le nouvel élan est brisé par la Covid, tous les marchés stoppés net. Mais c’est une découverte inattendue que va faire un collaborateur curieux et observateur : la barrette nasale du fameux masque sanitaire jetable n’est autre qu’un fil métallique gainé de plastique… eurêka ! L’opportunité est inouïe ! Immédiatement, on plonge sur Internet et les réseaux sociaux à la recherche des fabricants français de masques. Les premiers contacts sont pris. Techniciens, ingénieurs, opérateurs : toute l’équipe est sur le pont pour répondre au plus vite aux demandes, précommandes, prototypages, normalisation et autres tests de pince-nez à insérer dans les masques. Didier Lange, expert de l’extrusion et ex-directeur R & D du groupe Bic, vient apporter ses conseils avisés.
Sur un marché où la concurrence est rare mais la demande subitement énorme, Capifil va vite s’imposer. Les bobines de fil gainé, en longueur de 2 000, 5 000 ou 7 500 mètres, sont expédiées dans l’Hexagone et, pour la première fois, dans quelques pays limitrophes. Les chiffres explosent : 15 000 kilomètres de fil sont expédiés chaque mois, soit un potentiel de 2,3 milliards de barrettes par an. La moitié du marché français !
Déménagement
D’ailleurs, une nouvelle ligne de fabrication vient d’être installée, pour 500 000 euros, dans l’atelier de Cras qui ne sera bientôt plus assez grand. Un projet immobilier est en cours : Capifil devrait déménager à Saint-Marcellin d’ici fin 2022 pour un investissement de 4 millions d’euros. Les recrutements suivront. La société pourra aussi intensifier ses relations avec PSI Extrusion (Romans), une autre entité de la galaxie Sivinvest *, la holding d’investissement de Patrick Sivera.
En quelques mois, l’histoire de Capifil a pris une autre tournure grâce aux masques jetables devenus un débouché majeur (la direction préfère rester discrète sur son poids économique) qui ne devrait pas disparaître de sitôt. Le reste se répartit entre l’automobile, la fibre optique, le cuivre, la fibre de verre ou de carbone, pour de multiples applications, sans oublier les filaments pour imprimantes 3D… un autre marché à gros potentiel.
* Parmi la douzaine de participations de Sivinvest, signalons Erma 38 (Claix/Isère ; mécanique de précision ; 18 pers ; CA 2019 : 2,5 M€).
CAPIFIL EN QUELQUES DATES
1992 : création de Cap Industrie (gainage sur profilé acier pour le soudage industriel). 2013 : Cap Industrie devient Capifil. 2016 : 10 personnes et 2,2 M€ de CA. 2016 : reprise par Sivinvest (Patrick Sivera). 2020 : 26 personnes et 3,4 M€ de CA, résultat net de 10 %. 2021 : CA (prév.) : 4,5 M€ dont 25 % à l’international. 2022 : Déménagement prévu à Saint-Marcellin. 2025 (prév.) : 47 personnes et 7 M€ de CA.
Cet article a été publié dans le numéro 2461 de Bref Eco.