Hervé de Malliard, PDG et Sébastien Bernay, directeur de site, à côté de l’automate de Stilla Technologies, en cours de montage.
A.R.
Le coq chante fort à Mably, près de Roanne ! Un entrepreneur lyonnais et une équipe de haute technicité ont (re)lancé une usine de fabrication d’équipements de diagnostic in vitro et d’appareils de thérapie génique. Un site qui pourrait devenir emblématique de la dynamique française, réunissant les forces du Coq Bleu (industrie), du Coq Rouge (technologie), du Coq Vert (transition écologique) et du Coq Blanc (santé). Rien que ça.
Propriétaire de MGA Technologie à Civrieux d’Azergues dans le Rhône (machines spéciales pour I’industrie de la santé), d’ATG Technologies à Avignon (machines industries des semi-conducteurs et les applications de robotique avancée) et de Focussia à Castries dans I’Hérault (logiciels pour automates), Hervé de Malliard (dont le groupe pèse 25 M€ en 2023 avec 130 personnes), par aileurs conseiller du commerce extérieur et ambassadeur French Fab, n’est pas peu fier de raconter comment il a relocalisé ou plutôt maintenu une activité de haut vol dans les automates médicaux à Mably, grâce à une équipe de « niveau mondial ». Il faut savoir que cette compétence existe dans le bassin roannais depuis 1981 et la naissance de la société Noviloire, rachetée dans les années 90 par le suisse Diamed qui spécialise I’équipe dans les instruments d’analyse pour les laboratoires. En 2007, l’entité change à nouveau de main pour entrer dans le giron de l’américain Bio-Rad qui développe la société (elle atteint jusqu'à 200 personnes).
Un projet à 10 millions d’euros
Mais en 2021, le groupe annonce vouloir fermer Roanne pour concentrer sa R & D à San Francisco et sa production à Singapour. « Chez MGA, nous faisons des appareils uniques et sur-mesure. J’ai toujours rêvé d’avoir aussi une équipe qui développe et produit en série », confie Hervé de Malliard qui visite alors I’usine mais se demande bien comment relancer un business en partant de zéro (l’usine ne fabriquait que pour Bio-Rad). Fin de l’histoire ? Eh bien non. Sébastien Bernay, un cadre de l’ancienne usine parti dans la start-up parisienne Stilla Technologies, qui travaille sur un appareil qui digitalise les tests PCR mais ne pourra pas le fabriquer, contacte Hervé de Maillard, certain que l’équipe roannaise d’origine pourra relever le défi. Rapidement, l’affaire est conclue. MGA Medtech est créée à Roanne dans des locaux provisoires avec une équipe qui, pendant deux ans, développe l’appareil de Stilla. « Après le développement, on avait évidemment prévu de produire l'appareil, explique Hervé de Malliard, et il nous fallait pour cela une véritable usine ».
L’usine a été largement dimensionnée pour monter en puissance rapidement.
En octobre 2022, décision est prise de construire une usine de toutes pièces sur la zone d’activité de Bonvert. L'ouverture a lieu en décembre 2023. Un gros projet à 10 M€ pour l’achat du terrain, la construction du bâtiment de 4.000 m², les équipements et le personnel (35 personnes, bientôt 50) financé par Bpifrance, un pool bancaire, France Relance (2,2 M€) et des fonds propres de MGA (1,5 M€).
La microffuidique pour booster les tests PCR
Dans cette usine, on assemble donc le fameux appareil de Stilla en série, dont 85 % des pièces sont fabriquées à moins de 50 km. Il s’agit d’un équipement d’analyse génétique de pointe basé sur une technologie microfludique. À partir d'un prélèvement liquide, une petite barette de plastique - qui va faire toute la différence avec les technolopies concurrentes - permet d’éclater 10 microlitres du liquide en 20.000 gouttes qui vont servir de réacteurs à ADN. Chauffés, les brins d’ADN se séparent. Ils sont alors mis en contact avec des brins complémentaires modifiés de l’organisme recherché. S’il y a match, les brins réassemblés se multiplient en devenant fluorescents et permettant, via une caméra, de valider et quantifier la présence du génome recherché. Selon Sébastien Bernay, aujourd’hui directeur du site, cette technique permet de rechercher 28 types d’ADN simultanément et d’aller huit fois plus vite que les recherches d’ancienne génération.
Plein gaz sur la thérapie génique et cellulaire
Avec son équipe de premier plan, tant en R & D qu’en fabrication, MGA Medtech entend aujourd’hui multiplier les clients. « Grâce au réseau de Rémi Dangla, le fondateur de Stilla, nous sommes dèjà débordés », se réjouit Hervé de Malliard qui affiche trois verticales métiers. Les équipements de diagnostic in vitro intelligents comme l’appareil de Stilla. Mais également les appareils de thérapie génique et cellulaire. « Nous sommes positionnés ici sur la médecine du futur qui permettre à terme de régénèrer des organes et/ou de détruire des cancers. Nos clients sont des start-up issues de laboratoires ou de grands groupes qui travaillent sur ces questions mais qui ne disposent pas encore des technologies », explique l’entrepreneur qui estime que dans une dizaine d’années, ce type d’appareils sera probablement présent directement dans les hôpitaux. Tous ces outils nécessiteront des composants microfluidiques que MGA Medtech a bien évidemment prévu de concevoir et fabriquer. C’est sa troisième verticale.
Avec des bases telles que celles-ci, tout va très vite. MGA Medtech, déjà rentable, affiche 2,3 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2023 et prévoit 6,5 à 7 millions d’euros cette année, dont un tiers en R & D et deux tiers en production. Technologie de pointe, marché d’avenir, demande forte, usine high tech et largement dimension née : tout est réuni pour faire de MGA Medtech une future star. Restera le défi du recrutement !
Un bâtiment exemplaire
Fabriqué en bois et béton sur un terrain de 1,9 ha (laissant la place à de futures extensions), le bâtiment de MGA Medtech (4.000 m² dont 700 m² de bureaux), dessiné par Keops Architecture, dispose de brise-soleil orientables et d’un toit en sheds avec un côté vertical vitré pour la lumière naturelle et un côté incliné recouvert de panneaux photovoltaïques. Le tout est associé à un éclairage automatique, une pompe géothermique et bientôt des ombrières photovoltaïques. « Ce sera une usine à énergie positive avec une performance supérieure de 20 % à la RE2020 », se félicite le dirigeant qui cite encore la récupération des eaux de pluie et la plantation de 387 arbres.
Le bâtiment de MGA Medtech à Mably est entré en service fin 2023.
Une usine high-tech à plus d’un titre
Outre la performance environnementale du bâtiment ; les technologies de pointe employées en mécatronique, optronique, micro-fluidique, informatique, IA, machine learning, électronique et mécanique ; et la fabrication de machines de premier plan, MGA Medtech a choisi de généraliser l’excellence à tous les domaines. Exemple : le suivi de production est digitalisé via un MES (logiciel de pilotage de la production) compatible ISO-13485 (management de la qualité pour l’industrie des dispositifs médicaux), ce qui, selon Hervé de Malliard, serait une première mondiale dans les medtech. Qui plus est, ce MES a été développé en interne, au sein de la filiale Focussia, et interfacé avec un ERP développé par la société CISA basée à Bourg-en-Bresse. Citons également l’intralogistique qui a été entièrement robotisée avec des AGV de la société française Scallog (Nanterre), un kitting (regroupement des éléments nécessaires à la fabrication d’un produit) lui aussi robotisé par pick-to-light et des AMR de chez Sherpa (société alsacienne).
L’intralogistique a été complètement robotisée.
Cet article est issu de notre hors-série « Les Champions de l'Industrie » tome 5, à retrouver ici.