Pari gagné pour Bruno Bonnell, patron de Robopolis (Villeurbanne) et président du syndicat professionnel Syrobo, qui organisait, la semaine dernière à Lyon, le premier Sommet européen du robot de services, Innorobo. “Nous attendions 3 000 personnes, nous dépasserons les 10 000 visiteurs” , affirmait-il à quelques heures de la fermeture de la manifestation, dont l’édition 2012 est déjà annoncée. Satisfait, donc, l’ex-dirigeant d’Infogrames-Atari. D’abord, de voir que les politiques ont répondu “présent” , reconnaissance non négligeable compte tenu des enjeux de cette filière naissante : Jean-Jack Queyranne, président de la Région Rhône-Alpes, et Gérard Collomb, président du Grand Lyon, sont venus prendre un petit bain de foule. Ensuite, d’avoir su attirer un public de professionnels et d’investisseurs, même si le marché des robots n’en est qu’à ses balbutiements. Enfin, d’avoir ouvert ce monde aux étudiants d’écoles d’ingénieurs : “si elle ne veut pas rater le virage de la robotique, la France devra former ses propres roboticiens !” Cerise sur le gâteau, la presse a répondu de même : 150 journalistes ont couvert l’événement.
Robot humanoïde jouant au football, robot dinosaure se comportant comme un animal de compagnie, robot aspirateur, ou donnant des cours d’anglais, ou encore assistant les personnes âgées ou handicapées... : la robotique n’est plus l’apanage des chaînes de fabrication industrielles ; elle est entrée dans le monde des humains. Combien de temps lui faudra-t-il pour conquérir le grand public, passer de la démonstration ludique à l’usage quotidien, et à un prix acceptable par le public ? Les plus optimistes (fabricants de robots, bien sûr !) annoncent la couleur : “L’automobile a mis cinquante ans à s’imposer, Internet à peine une quinzaine d’années. Dès qu’ils arriveront, je ne donne pas plus de cinq ans aux robots pour se généraliser” , annonce Bruno Maisonnier, pdg d’Aldebaran Robotics et père de Nao (en photo). La formule est un peu facile. Car le saut technologique qu’impose le passage d’une robotique industrielle à une robotique de services, est énorme. Pour être un compagnon autonome de vie, le robot devra s’adapter à un environnement autrement plus complexe (la rue, les bureaux, la maison...) que celui d’une usine. L’avènement des robots “de service” fera donc appel à des capacités de recherche et d’innovation considérables... autant qu’à une industrie de pointe. Deux points sur lesquels la France, et la région Rhône-Alpes en particulier, ont de belles cartes à jouer.
Relais de croissance pour une industrie nationale à la peine, nouvelle source d’activités et d’emplois : la robotique n’en pose pas moins de vraies questions éthiques et sociétales(1). Doit-on imposer des limites au robot “social” ? Peut-il être source d’émotions ? Va-t-il accentuer la déshumanisation des rapports sociaux ? Un robot peut-il être responsable de ses actes ? Autant d’interrogations dont la sphère politique devrait commencer à s’emparer.
Didier Durand
(1) Lire l’ouvrage très intéressant sorti à l’occasion d’Innorobo : “Portrait Robot”, réalisé par le Grand Lyon et que l’on peut retrouver sur www.millenaire3.com
Bref Rhône-Alpes n° 2030 du 30/03/2011
Photo 1 : Nao, un humanoïde de 58 cm conçu par Aldebaran Robotics (Paris).
Photo 2 : Genibo, le premier robot compagnon émotionnel développé par le coréen Dasarobot.
Photo 3 : iRobi, du coréenYujin Robot.