La Quinzaine de l’international (11-21 avril) a été officiellement présentée, la semaine dernière, en présence de l’ensemble des acteurs du soutien à l’export. Autant dire que la large tribune n’était pas de trop pour permettre aux représentants de ce “millefeuille” à la française de s’exprimer. Réseau des CCIT, Entreprise Rhône-Alpes International (Erai), Oséo, UbiFrance, Coface, sociétés privées de conseil (OSCI), conseillers du commerce extérieur, Medef, CGPME… c’est peu de dire que l’équipe de France à l’export est pléthorique. Mais la situation pourrait bien changer : après l’idée lancée il y a quelques années (mais jamais aboutie) d’une Maison régionale de l’International regroupant tous ces acteurs, l’Etat pousse à la mise en place d’un guichet unique. A suivre.
Dès le lendemain de cette grand-messe unitaire, la CCIR remettait le couvert pour la Semaine de l’Industrie. Au pupitre, cette fois, un seul orateur : le pdg du groupe Seb (Ecully/Rhône), Thierry de la Tour d’Artaise, dont l’intervention aurait tout aussi bien pu illustrer le thème de la veille. Car Seb constitue un vrai cas d’école, entre local et global, terroir et mondialisation, familial et financier. A l’issue de la Seconde Guerre mondiale, la Société d’Emboutissage de Bourgogne employait quelques salariés seulement. Aujourd’hui leader mondial de l’électroménager, le groupe multimarques (Seb, Calor, Tefal, Krups, Lagostina, Moulinex, Rowenta, Arno, Supor…) en compte 22 000, dont 11 000 en Chine et 2 000 en Amérique du Sud. Avec 6 000 salariés, la France regroupe quant à elle 27 % des effectifs tout en représentant 19 % du chiffre d’affaires du groupe. L’Hexagone a conservé 90 % des activités de recherche et une partie de la production : c’est dans son usine de Pont-Evêque (Isère) que sont fabriqués les fers à repasser du groupe.
De l’intervention de Thierry de la Tour d’Artaise, on retiendra trois idées fortes. La première, c’est la “sérénité” que procure un pouvoir resté entre des mains familiales : 250 actionnaires détiennent encore 43 % du capital et 63 % des droits de vote. “C’est la plus grande force que le groupe ait jamais eue ; une chance inouïe qui nous permet d’avoir une vision de long terme”, insiste le pdg. Et de ne pas avoir l’attention rivée en permanence sur le cours de Bourse.
La seconde, c’est une vision sans tabou, pragmatique, de la mondialisation : “Nous ne pouvons faire autrement que de délocaliser certaines productions. Il est illusoire de dire qu’on peut tout fabriquer en Europe. Mais notre force, c’est l’innovation ; c’est elle qui nous permettra de résister, de conserver notre position dans les pays matures et des activités industrielles en France, en évitant de tout délocaliser comme l’ont fait les Américains”.
La troisième idée, c’est que l’innovation n’a pas de limite. “Quand j’ai pris la présidence du groupe il y a près de dix ans, on m’a dit que l’industrie n’avait plus d’avenir. Nous avons prouvé le contraire, par l’innovation. Le consommateur est prêt à la payer quand elle est réelle”. Chez l’inventeur du fer à repasser (Calor), qui fabrique aujourd’hui des friteuses sans huile et sort des dizaines de nouveaux produits chaque année, on en est convaincu : “notre industrie culinaire a de l’avenir”.
Didier Durand
Bref Rhône-Alpes n° 2032 du 13/04/2011