Le repas gastronomique des Français a donc été reconnu par l’Unesco comme patrimoine immatériel de l’Humanité. Dans un monde qui a tendance à uniformiser ses façons de consommer et de se nourrir, l’exception culinaire française fait de la résistance : chez nous, la convivialité du repas à domicile résiste davantage qu’ailleurs face à la restauration hors foyer ; et les Français passent encore près de 100 minutes à table chaque jour contre 40 à peine pour les Américains. C’est une vraie culture identitaire du “manger beau, bien et sain” que l’Unesco a ainsi voulu labelliser.
Cette récompense doit déboucher sur la création d’une “Cité du goût et de la gastronomie” qui cherche actuellement son futur lieu d’implantation. Paris est candidate (l’Hôtel de la Marine, place de la Concorde), mais le lobby lyonnais croit en son étoile. “Je pense que nous avons une longueur d’avance sur d’autres candidatures”, estimait la semaine dernière Jean-Jack Queyranne, sortant d’une réunion de travail avec le porteur du projet Jean-Robert Pitte, président de la Mission française du Patrimoine et des cultures alimentaires. En vue : l’installation de cette Cité dans l’historique Hôtel Dieu, en plein centre de Lyon, qui va faire l’objet d’un vaste plan de réhabilitation.
Ce projet peut compter sur le soutien des membres fondateurs d’Allira, tout nouveau cluster alimentaire régional(1). Destinée à améliorer la notoriété d’une filière aussi traditionnelle qu’innovante, qui fait se côtoyer le Saint-Marcellin et le plus sophistiqué des alicaments, cette nouvelle grappe entend aussi rapprocher ses nombreuses PME sur des projets de R&D, faciliter la transmission d’entreprises ou encore leur déploiement à l’export. Bref, renforcer la compétitivité d’une filière qui pèse lourd dans la région. Avec ses 44 700 salariés, celle-ci représente 11 % des emplois industriels régionaux (et 9 % de l’industrie alimentaire nationale), se plaçant derrière la mécanique et la métallurgie, mais devant la plasturgie, la chimie ou la pharmacie !
Malgré quelques faiblesses (un solde export/import négatif), l’agro-alimentaire ne perd pas d’emploi… une exception dans le paysage industriel national, due en particulier au caractère non délocalisable de ses activités. Portée haut par ses artistes de la cuisine, Paul Bocuse en tête, la filière permet aussi à Rhône-Alpes de rayonner dans le monde entier. Cela a encore été le cas, il y a quelques mois à Lyon, lors du Sirha. Entre culture et industrie, fourche et fourchette, le salon international des métiers de bouche a montré, une nouvelle fois, une incroyable vitalité.
Didier Durand
(1) Membres fondateurs : Aria (association régionale des industries alimentaires ; président : Bernard Gaud), Coop de France Rhône-Alpes/Auvergne (pdt : Jean-Luc Flaugère), Chambres consulaires, Isara-Lyon, PEACritt, R3AP. Président : Albert Thievon ; délégué général : Michel Guglielmi.
Le démarrage du cluster est financé par la Région Rhône-Alpes (212 000 euros). Il doit ensuite, en principe, largement s’autofinancer. Objectif affiché : 50 membres d’ici fin 2011.
Bref Rhône-Alpes n° 2035 du 11/05/2011
Photo : ©T. Carron. Sur le salon du Sirha, à Lyon