La fraude de Volskwagen pourrait bien être un mal pour un bien. Elle pourrait en effet apporter de l’eau au moulin de la RSE…
Fraude massive sans précédent, scandale, stupeur, mardi noir du Made in Germany : l’incroyable scénario des tests anti-pollution truqués par Volkswagen a immédiatement sucité de vives réactions. Certes, ce n’est pas la première fois qu’une entreprise est accusée de prendre des libertés avec la déontologie la plus basique, et pas seulement parmi les grands groupes. Mais que Volkswagen, symbole industriel de la rigueur et de la qualité allemandes, puisse tromper la confiance des consommateurs ! “Aucun écrivain n’aurait imaginé pareille histoire”, écrivait le philosophe Roger-Pol Droit dans Les Echos. Les répercussions de cette manipulation à grande échelle seront énormes : amendes en milliards d’euros, rappels de voitures, enquêtes et procès, image à jamais entachée et, dans l’immédiat, cours de l’action boursière en chute libre. Certains diront que le capitalisme est décidément incorrigible. D’autres avanceront que cette faillite de la morale allemande apporte de l’eau au moulin de la Responsabilité sociétale de l’entreprise. Et ils ont quelques arguments. Car tout ce que les tenants de la RSE expliquent, depuis une vingtaine d’années, se retrouve dans ce thriller industriel qui met à jour une trahison de toutes les “parties prenantes” : clients, salariés, environnement, société. Une trahison dénoncée par des citoyens actifs dont les informations sont relayées immédiatement par Internet et les médias du monde entier, avec une déflagration assurée.
La mise en œuvre d’un libéralisme loyal est-elle la seule issue des entreprises qui, sinon, jouent au feu avec le risque que tout explose ? Certaines sociétés ont pris conscience du danger et réagissent, parfois sous la pression. D’autres sont poussées par les convictions personnelles de dirigeants plutôt respectueux et bienveillants. Le chimiste Solvay (4 800 salariés en Rhône-Alpes) fait partie de ce second groupe. Jacques Kheliff, son directeur du développement durable, rappelle que 65 % des produits du groupe (10 000 références) sont désormais évalués en fonction de leur impact environnemental et social. Ainsi, ses fibres entrant dans la fabrication des filtres de cigarettes, bien que biosourcées et biodégradables, sont mal notées… car la cigarette tue ! Autre engagement de la démarche intitulée Solvay Way : la rémunération variable de 7 500 cadres du groupe dans le monde (130 sites dans 55 pays) en fonction de critères RSE.
Selon le 8ème baromètre annuel sur la performance responsable de l’agence Capitalcom, sorti début octobre, 23 sociétés du CAC 40 appliquent ce dernier principe (elles étaient 16 en 2013). Selon Capitalcom, “le business responsable n’est pas un effet de mode. Au contraire, il devient une composante clé du modèle d’affaires”. Ainsi, c’est L’Oréal qui annonce que 100 % de ses produits démontreront en 2020 un impact environnemental et/ou social positif ; c’est Michelin qui déclare qu’un tiers des matières premières utilisées dans la fabrication de ses pneus provient désormais de sources renouvelables ; c’est un cinquième du chiffre d’affaires de Legrand qui est issu de produits éco-conçus. Bref, contrainte ou volontaire, la RSE avance. Et l’affaire Volkswagen pourrait bien accélérer le mouvement.
Didier Durand
@didierldurand
Photo : ©Frédéric Janisset. La plateforme des Roches-Roussillon, en Vallée du Rhône, vient de fêter son centenaire. Elle conduit une démarche éco-responsable sous l’égide d’un GIE regroupant une quinzaine de chimistes.
Bref Rhône-Alpes n° 2217 du 07/10/2015
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