Clémence Deloison, responsable du site de Lyon et Ludovic Célérier, cofondateur.
A.R.
HipTown est en train d’ouvrir à Lyon, dans le bâtiment Le Britannia à la Part-Dieu. Encore un espace de coworking ? Certes, mais son directeur général et cofondateur, Ludovic Célérier, n’a pas peur de proposer le tiers-lieux de trop. Car il mise sur un concept différenciant. Explications.
Bref Eco : Comment le projet HipTown est-il né ?
Ludovic Célérier : A la base, c’est une idée de Matthieu Sorin qui avait créé en 2014 le concept de coworking Nextdoor/Wojo pour Bouygues Immobilier. Je l’ai connu, ainsi que Xavier Thomas, qui travaillait au développement de Nextdoor, au moment où j’avais cofondé une société d’édition de logiciels de gestion des espaces de coworking. J’ai ensuite accompagné Nexity Entreprises sur un concept de coworking aujourd’hui abandonné. Finalement, nous avons mis en place tous ensemble HipTown, avec Nexity en tant qu’incubateur et investisseur.
Bref Eco : Où avez-vous débuté ?
Ludovic Célérier : Notre premier espace a été monté à Marseille dans le bâtiment d’une mutuelle étudiante qui disposait de surfaces libres. Nous l’exploitons en prestation de services pour le propriétaire de l’immeuble : nous facturons les utilisateurs et nous reversons les loyers diminués d'une commission.
Le deuxième espace est aussi né à Marseille dans une rue en renouveau et sur un modèle différent : nous avons un bail précaire avec un loyer fixe et un loyer variable, fonction de notre chiffre d’affaires, ce qui est très résilient en période Covid.
De nombreuses entreprises ont quitté leurs locaux pour économiser
Bref Eco : Qu’est-ce qui vous différencie des autres espaces de coworking, pour les utilisateurs ?
Ludovic Célérier : Les grands espaces de coworking misent sur une offre premium qui nécessite des investissements de plus de 1.000 €/m². Nous proposons au contraire une offre économique avec des prix 10 à 15 % inférieurs (- 25 % à Paris) tout en faisant plus de marge (1). Nous nous adaptons à l’immeuble et choisissons souvent un bâtiment de seconde main. Et cela a d’autant plus d’intérêt en cette période de Covid durant laquelle de nombreuses entreprises ont quitté leurs locaux pour économiser. Cette proposition économique présente aussi l’avantage de réduire l’empreinte carbone des bureaux, souvent extravagante.
Bref Eco : C’est-à-dire ?
Ludovic Célérier : Nous réduisons les travaux de réhabilitation des bâtiments ce qui nous amène à investir 250 €/m² contre plus de 1.000 € pour certains concurrents. Ici, à Lyon, nous économisons 6 tonnes de matières premières soit 26 tonnes de CO2. Nous conservons le plus de choses possibles et achetons des produits de seconde main. Le mobilier de Lyon a par exemple été acheté lors d’une vente aux enchères. Nous réduisons par ailleurs les consommations d’usage comme le papier et le plastique, nous ne mettons pas d’imprimante à disposition. Cela va jusqu’au chauffage que nous réglons à 19 degrés.
Nous pensons en effet créer de petits sites périphériques de 200 à 400 m²
Bref Eco : A Lyon, vous emménagez sur 2.200 m² dans l’immeuble le Britannia à la Part-Dieu. Quel est le modèle ici ?
Ludovic Célérier : Ici, nous accompagnons le propriétaire dans l’optimisation des surfaces. Le bâtiment va être réhabilité dans trois ans et il s’agissait de l’utiliser d’ici là. Mais d’autres développements devraient voir le jour. Nous pensons en effet créer de petits sites périphériques de 200 à 400 m² à Vaulx-en-Velin, Vénissieux ou Villeurbanne, qui fonctionneraient en autonomie, sans personnel, via des réservations par internet. Il y a une demande pour des petites surfaces. On se positionne par ailleurs sur des appels d’offres de collectivités qui cherchent des exploitants.
Bref Eco : Le modèle est donc en train d’évoluer…
Ludovic Célérier : Oui, et pas seulement dans ce sens. On constate que le rapport à l’immobilier change. On nous demande de plus en plus un modèle de « bureaux opérés » car les entreprises ne veulent plus de bail 3/6/9. Dans ce cas, nous prenons le bail à notre compte, nous nous occupons de tout et nous accueillons les entreprises, de manière très souple dans les locaux, en prestation de service, ce qui est encore assez rare. Nous avons aussi un autre levier de développement, dans le conseil, car certains exploitants de lieux de coworking nous demandent de les aider à commercialiser ou redynamiser leurs espaces.
Bref Eco : Quel est votre chiffre d’affaires et qu'espérez-vous quant à son évolution ?
Ludovic Célérier : En 2020, nous avons réalisé 240.000 euros avec trois petits sites. En 2021, avec sept sites, nous visons 2 millions d’euros. Et en 2024, nous pensons que nous gérerons 35 sites.
(1) HipTown annonce des tarifs à partir de 150 €/mois pour un nomade et 350 € pour un bureau fermé à Lyon.