Transmission d’entreprise : un moment fort - In Extenso
« Transmission d’entreprise, un patrimoine à gérer » : c’est le titre du débat qu’a organisé le cabinet In Extenso, jeudi 7 mars à la Villa Lumière (Lyon), et dont Bref Eco était partenaire. Analyses et témoignages emplis d’émotions ont souligné combien la transmission est un moment très particulier dans la vie de l’entreprise, de ses dirigeants et de leur famille. Un moment fort.
Conclusion d’une vie (ou d’une longue période) de travail, la transmission de son entreprise est pleine de promesses mais constitue aussi un virage délicat. Elle met en jeu des ressorts psychologiques autant que des enjeux économiques et financiers. Elle est guidée par des relations humaines et souvent familiales qui peuvent être mises à l’épreuve. Bref, pendant une période qui peut durer quelques mois mais parfois plusieurs années, il faut parler d’argent, de projet de vie et de stratégie d’entreprise. Pas toujours simple. Laurianne Dijol (Groupe L’Albaron), Anne-Sophie Panseri (Maviflex) et Laurent Fiard (Visiativ) ont illustré le propos à leur manière.
Pérenniser l’entreprise
A la tête de sa propre entreprise de conseil en formation, Laurianne Dijol n’avait jamais été très enthousiaste à l’idée de reprendre l’entreprise de services immobiliers créée par son père… que celui-ci rêvait pourtant de lui transmettre. Après mûre réflexion et un diagnostic économique précis, elle change finalement d’avis : en 2016, elle cède sa société et entre chez L’Albaron, qu’elle détient à parité avec son frère. Commence alors une nouvelle vie. « Pour être à l’aise dans ce genre de situation, il faut être capable de séparer plusieurs sphères : la vie familiale (le repas dominical autour du poulet), le business (les décisions commerciales, managériales ou stratégiques pour l’entreprise) et la dimension patrimoniale. J’ai beaucoup appréhendé. Mais finalement, malgré nos différences de point de vue, l’aventure est très riche et positive pour nous et pour l’entreprise. » Anne-Sophie Panseri a elle aussi repris un département de l’entreprise de son père, que celui-ci avait décidé de vendre. Elle a ainsi dirigé Maviflex pendant dix-sept ans, avec son frère dont elle a toujours loué la totale intégrité dans une relation pourtant sujette à vents et marées. Un frère qui, pourtant, émet son désir de se désengager à partir de 2017. Après avoir étudié toutes les possibilités, Anne-Sophie Panseri ne voit guère de solution, jusqu’à ce qu’une proposition extérieure vienne débloquer la situation : un groupe industriel allemand lui propose de racheter Maviflex.
« Un élément a beaucoup pesé dans notre décision de céder : notre volonté de pérenniser notre entreprise, alors qu’à terme, compte tenu de sa petite taille à l’échelle internationale, elle se préparait à des jours très compliqués », explique la dirigeante. « Je ne voulais pas revivre les années de très grande incertitude que j’avais connues quand Maviflex a été placée en procédure de sauvegarde, entre 2006 et 2010. » L’histoire familiale ne se poursuivra donc pas via Maviflex mais à travers les participations qui seront prises dans d’autres entreprises par la holding qu’Anne-Sophie Panseri a créée avec ses enfants.
Pour Anne-Sophie Panseri comme pour Laurianne Dijol, l’entreprise familiale n’est pas une vache sacrée. « Reprendre l’entreprise familiale ? Ce ne doit pas être un sacerdoce. On peut utiliser autrement le capital qu’on nous transmet », insiste Laurianne Dijol.
« Il faut choisir le bon moment ».
La situation est très différente pour Laurent Fiard qui dirige le groupe lyonnais Visiativ avec Christian Donzel. Coactionnaires depuis 1986 de cette entreprise rachetée à deux lorsqu’elle n’était que la filiale française d’un groupe suisse, ce ne sont pas des liens familiaux qui les ont rapprochés.
Plutôt une vision commune, les mêmes ambitions et des perspectives partagées quant à l’avenir de l’entreprise. « Le problème dans une transmission, c’est qu’on n’en connaît jamais le timing. D’où l’importance de la préparation », explique-t-il.
Jean-Marc Chevassus, maître de conférence à l’Université Lyon 3, confirme : « Bien sûr qu’il faut y avoir beaucoup réfléchi et… avoir prévu ce que l’on fera après ! Car la vie change beaucoup après la transmission.
Le dirigeant n’a plus le rôle social qu’il avait auparavant. »
Une longue préparation : c’est la condition d’une transmission réussie. Comme le dit Marc Sabaté, directeur général d’In Extenso Finance & Transmission : « Il n’y a certes pas de recette miracle. Mais il faut être prêt et bien choisir son moment. »