Parmi plusieurs fonctions, Bénédicte Durand est notamment co-cheffe de file France Industrie pour la région Aura.
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En ce début d'année, nous vous proposons une série d'interviews de décideurs économiques de la région sur leurs espoirs et visions pour 2024. Rendez-vous aujourd'hui avec Bénédicte Durand, la dirigeante d’Altheora (ex-Mecelec), une entreprise industrielle qui transforme des matières composites en pièces industrielles. Bénédicte Durand est aussi présidente de Polyvia (syndicat de la plasturgie) et co-cheffe de file France Industrie pour la région Aura. Elle estime que beaucoup de sujets sur la décarbonation peuvent être portés par la réindustrialisation.
Bref Eco : Quels ont été pour vous les faits les plus marquants de l’année qui vient de s’achever ?
Bénédicte Durand : On ne peut pas mettre de côté le contexte économique dans lequel on évolue, qui donne une coloration complexe à 2023. Avec des taux d’intérêt à des niveaux qu’un certain nombre d’industriels n’ont jamais connu jusque-là, ou en tout cas pas depuis longtemps. Avec des secteurs d’activité très touchés. Je pense notamment à la construction, mais aussi à des filières telles que la plasturgie et les composites, l’automobile et l’emballage. Par ailleurs, les nouvelles réglementations qui sont en train d’être mises en place et de se déployer sont sources d’interrogations et évidemment d’incertitude.
Dans quelle direction évoluent ces réglementations ?
B.D. : Un certain nombre d’entre elles, que ce soit au niveau européen et français, sont en train de faire évoluer d’une manière générale nos modèles industriels. Tout cela évidemment à l’aube d’une ère qu’il faut décarboner. Avec une partie correspondant à des choix stratégiques et une autre qui est plus contraignante. Et en tant que Français, on aime bien être au top de ces réglementations entreprises au niveau européen.
2023 a donc été une année difficile ?
B.D. : Il est un peu tôt pour tirer le bilan à ce stade. J’ai plutôt envie de qualifier de complexes ces trois dernières années, de moins stables que les précédentes. Avec des enjeux, au niveau entre autres de l’industrie, qui sont extrêmement importants. Des initiatives portées par France 2030, par la loi Industrie verte sont en train de s’accélérer. Qui font qu’on est à l’aube d’un changement assez profond, dont il faut s’emparer.
Où en est la problématique du coût de l’énergie très forte il y a un an ?
B.D. : C’est un peu moins le cas parce que les chefs d’entreprise se sont adaptés. Mais cela reste prégnant car on a encore des coûts énergétiques extrêmement importants et aussi parce qu’on est tous dans l’attente de ce qui va se passer post ARENH (Accès régulé à l’énergie nucléaire historique). Avec donc des incertitudes, même si on a entendu des déclarations qui viseraient à atteindre un prix moyen permettant de conserver notre compétitivité.
Quels sont les autres sujets de préoccupation ?
B.D. : En dehors du besoin de poursuivre la montée en compétences par le développement de la formation et de la créativité, est apparue, d’un point de vue macroéconomique, la question de l’inflation et de son impact sur le coût de l’argent. C’est important pour les entreprises industrielles qui sont souvent à forte intensité capitalistique. Avec des investissements indispensables dans nos plans de croissance et de développement.
La décarbonation nécessite elle aussi des investissements massifs, de plusieurs dizaines, voire centaines de milliards à l’échelle nationale, dans lesquels le privé prend sa part…
B.D. : Beaucoup de sujets sur la décarbonation peuvent être portés par la réindustrialisation en France. C’est le très bon côté de ces dernières années et des différentes crises qu’on subit. On sait bien qu’en France on a l’euro de PIB le plus décarboné du monde. Donc c’est une opportunité incroyable dont il faut se saisir.
Donc la marche vers la réindustrialisation ne s’en trouve pas compromise ?
B.D. : Non, au contraire ! Il y a énormément d’initiatives autour de la décarbonation, c’est hyperenthousiasmant. Je trouve que l’industrie est un sujet qui rassemble, entre les grandes entreprises, les moyennes et les petites, celles spécialisées dans les services, les start-up, les territoires et les services de l’État.
Cet article est issu de notre hebdo n°2564, à retrouver ici.