Yannick Marion, fondateur de Beelse.
Intégrée depuis peu dans l’incubateur de l’Agence spatiale européenne (ASE), la jeune entreprise savoyarde Beelse se prend à rêver : « Le jour où l’ASE aura installé sa base lunaire, notre technologie lui permettra de fabriquer sur place des pièces détachées », explique son dirigeant fondateur Yannick Marion.
Ancien sportif de haut niveau en tir à l’arc, le trentenaire sait regarder loin devant lui. Mais la lune, ce sera dans quinze ans, peut-être. En attendant, Beelse veut révolutionner la production et la logistique des pièces industrielles de rechange ou de petites séries. Avec deux promesses aux entreprises auxquelles la société s’adresse : les rendre autonomes, avec une fabrication au moment voulu, à proximité des clients, et des temps de livraison record.
Un véritable entrepôt numérique
L’innovation de Beelse repose sur un logiciel de cloud manufacturing associé au parc mondial de machines de fabrication additive. « L’industriel définit toutes les caractéristiques techniques et d’usage de la pièce voulue sur son fichier numérique privé, puis notre logiciel décrit alors l’ADN de la pièce et l’homologue. » Un simple navigateur Saas, un Cloud sécurisé et une licence d’exploitation font le reste : il est alors possible de lancer une production n’importe où dans le monde, au plus près du client final, car le logiciel connaît la disponibilité de toutes les imprimantes 3D installées sur le globe (à partir des données des fabricants de machines). L’industriel dispose ainsi de son propre « entrepôt numérique » dont il gère les flux à sa guise. Fini les stocks physiques. Terminé les commandes à délai plus ou moins aléatoire.
« Le service apporté aux industriels est énorme. Récemment, le groupe ARaymond a remporté un contrat de plusieurs millions d’euros en s’appuyant, entre autres, sur la sécurisation des approvisionnements qu’a pu apporter notre système à son client », explique Yannick Marion. Le dirigeant aime aussi citer les contrats signés avec le Cern ou encore la SNCF dont le besoin de pièces de maintenance est très important. De même, le logiciel de Beelse devrait prochainement gérer le SAV d’un groupe de bricolage.
Une deuxième levée de fonds de 500.000 euros
Beelse (5 salariés) boucle fin juin une deuxième levée de fonds de 500.000 euros, deux ans et demi après la première (120.000 euros). Les investisseurs sont des industriels régionaux qui apportent aussi leur connaissance des marchés au jeune dirigeant. Ces capitaux frais permettront à l’entreprise de recruter trois personnes et de structurer un réseau commercial européen.
Installée dans les Villages by CA de Chambéry et de Grenoble après avoir été incubée à Savoie Technolac, l’entreprise table sur 4,5 millions d’euros de chiffre d’affaires dans les trois ans. « La crise sanitaire et le blocage des chaînes logistiques mondiales qui en a découlé ont joué en notre faveur ; nous avons pu mieux faire comprendre notre business », explique Yannick Marion qui annonce une nouvelle ère industrielle, quelque peu démondialisée.
Cet article a été publié dans le numéro 2418 de Bref Eco.