Suzanne Kucharekoua-Milko, conseillère de la Cour régionale des comptes et Catherine de Kersauson, présidente
A.R
La Cour des comptes et sa chambre régionale viennent de publier un rapport qui scrute les différentes politiques menées pour aider les jeunes à accéder à l’emploi.
Il apparaît dans ce rapport sur l'Accès à l'emploi des jeunes que les trois quarts des jeunes accèdent rapidement à leur premier emploi mais que cette rapidité s’accompagne d’une précarité via la multiplication des CDD, contrats courts, temps partiel, le décalage entre le niveau de diplôme atteint et l’emploi occupé, le salariat déguisé.
Une concurrence entre les dispositifs
Pour tous ceux qui ont des difficultés, que font les pouvoirs publics ? Beaucoup de choses. « Il existe tout un paysage d’aides qui se sont empilées », explique Catherine de Kersauson, présidente de la chambre régionale. « Cela aboutit à un système complexe par le nombre de dispositifs et leur gouvernance, dont beaucoup se concurrencent entre eux ». En Auvergne-Rhône-Alpes, vingt réseaux d’orientation ont ainsi été recensés.
Des problèmes d'efficacité
Les magistrats de la Cour ont compilé tous les chiffres : ces dispositifs représentent 10,5 milliards d’euros par an en France dont 840 millions pour Rhône-Alpes (sans l’Auvergne). Selon l’enquête, les jeunes ont souvent le choix du dispositif. « Ils vont souvent vers les aides plus intéressantes financièrement à court terme que vers l’alternance par exemple », déplore Catherine de Kersauson.
Surtout, elle relève que malgré tous les dispositifs, il n’existe pas de parcours vers l’emploi : « Les missions locales ne disposent pas de grilles d’évaluation du bénéfice tiré de ce que l’on propose aux jeunes. Il y a seulement un enchaînement d’aides. Les différents intervenants ne sont pas interconnectés et la formation n’est pas assez mobilisée pour accéder à l’emploi. Les jeunes eux-mêmes doivent accepter de se former » explique la présidente.
La boucherie et la chaudronnerie boudées
Suzanne Kucharekoua-Milko, conseillère qui a réalisé l’enquête sur Saint-Etienne et Thiers, confirme qu’il y a une résistance des jeunes pour se former aux métiers en tension comme la boucherie ou la chaudronnerie. Catherine de Kersauson complète en insistant sur le fait que les pouvoirs publics doivent aussi davantage les inciter à se former plutôt que de privilégier les contrats d’avenir.
Nous proposons que l’argent des emplois d’avenir aille à l’apprentissage
Concernant les structures d’aide, une statistique très parcellaire apparaît : un jeune sur deux en sort en emploi. « Mais au bout de combien de temps ? » s’interroge Suzanne Kucharekoua-Milko qui explique également que rien ne prouve la plus-value de l’aide apportée.
Au final, la Cour des comptes recommande une simplification et une évaluation des structures. « Nous proposons également que l’argent des emplois d’avenir aille à l’apprentissage », conclut la présidente.
>>> Zoom sur Thiers et l’Auvergne
Selon les magistrats de la Cour des comptes, le paysage apparaît moins complexe sur les territoires des petites missions locales, comme celle de Thiers qui a construit une offre à la carte pour les jeunes qu’elle accueille. « Il y a beaucoup de moyens à disposition en Auvergne. Le problème pour les structures, c’est de mobiliser ces crédits qui sont souvent européens », explique Suzanne Kucharekoua-Milko. «Il faudrait peut-être des structures moins petites. Mais il s’agit d’associations dirigées par des élus locaux et la mutualisation est difficile» dénonce la magistrale.
Rapport consultable sur ce lien