Guillaume Pitron, auteur de « La guerre des métaux rares » (éditions LLL), sera présent au sommet Happy GovDay.
Le réalisateur et journaliste Guillaume Pitron sera l’un des 30 intervenants du 2e Sommet International des Gouvernances Responsables et Durables, Happy GovDay qui se tient le 27 novembre au siège de la Région Auvergne Rhône-Alpes. Thème : la guerre des métaux rares. Un sujet qui devient sensible sur un plan environnemental autant que géostratégique.
Germanium, indium, gallium, bismuth, tungstène ou encore scandium, yttrium, lanthane… Métaux et terres rares sont en train de devenir le pétrole du XXIe siècle, le siècle des énergies et technologies dites « propres ». Gros problème : le bilan écologique de ces composants devenus indispensables à notre vie quotidienne est très mauvais, comme l’explique Guillaume Pitron, auteur de « La guerre des métaux rares » (éditions LLL). Interview.
Le monde économique s’est mis à consommer beaucoup de métaux et terres rares. Pourquoi ?
Guillaume Pitron : Jusque dans les années 1970-1980, on les connaissait mais on n’en consommait pratiquement pas car on ne savait pas quoi en faire. Ils étaient des rebuts de l’exploitation de métaux abondants. Et puis on a fini par découvrir leurs propriétés très intéressantes (magnétiques, optiques, catalytiques), particulièrement pour les nouvelles technologies de l’information et les moteurs électriques.
Beaucoup d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques contiennent également des métaux rares
La demande de métaux et terres rares est très importante dans deux domaines particuliers : l’électronique et les télécoms, et les technologies dites « vertes ». Actuellement, pas de smartphone (on compte 55 métaux dans votre téléphone portable) sans métaux rares. Beaucoup d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques contiennent également des métaux rares. Même chose pour les véhicules électriques pour la fabrication desquels on utilise un minerai appelé graphite, du lithium (non rare mais stratégique), du néodyMe ou encore du cobalt (pour les batteries). D’où la ruée vers le cobalt de RDC par exemple, ces dernières années, avec une demande qui explose.
Le problème, c’est que ces « greentech »… ne sont pas « vertes » du tout ?
Guillaume Pitron : Exactement. L’exploitation minière des métaux rares est souvent catastrophique sur le plan environnemental. Simplement parce que, justement, ils sont rares. Pour récupérer un kilo de lutécium, par exemple, il faut extraire et concasser 1.250 tonnes de roches desquelles il faut le séparer ! Il faut aussi énormément d’eau ainsi que de produits chimiques. C’est d’ailleurs pour cela que la plus grande partie de la production de métaux et terres rares est aujourd’hui réalisée en Chine, qui détient un monopole sur certains d’entre eux, et dans d’autres pays pas très regardants sur leurs conditions d’exploitation.
Une certaine division internationale du travail s’est faite « naturellement » : en clair, certains pays font le « sale boulot » pour que nous puissions continuer à consommer davantage de produits électroniques et électriques. C’est le capitalisme. Je suis allé en Chine, et ce que j’ai vu des mines exploitées est apocalyptique. Rejets toxiques, consommation énergétique, etc. : c’est désastreux ! Les données et les informations sont connues… mais pas du grand public qui n’en a pas conscience.
Alors… quelles solutions prônez-vous ?
Guillaume Pitron : Attention, je ne dis pas qu’il faut tout arrêter. Il ne faut pas, pour autant, stopper la transition énergétique. Elle peut réussir mais… attention à ses effets pervers ! Je ne suis pas un « décroissant » mais tout de même, il va falloir accepter de changer nos habitudes de consommation et de production. Avec la transition énergétique, se produisent des effets rebonds : une technologie nouvelle va permettre des gains d’énergie et de ressources.
Il faudra penser davantage à l’économie circulaire
Le problème, c’est que les produits seront peut-être moins polluants mais nous sommes toujours plus à vouloir consommer davantage. On n’en sort pas. Il faudra donc penser davantage à l’économie circulaire : moins gaspiller la matière, la réutiliser, réparer les produits, afficher sur les produits leur impact matière, etc. Savez-vous que qu’il faut 70 kg de matière pour fabriquer un smartphone de 120 grammes ?