Stéphanie Pernod, première vice-présidente, déléguée à l’économie de la Région.
La Région Auvergne-Rhône-Alpes a voté en décembre un Plan de relocalisation qui se traduit par une enveloppe d’aides à l’investissement de 1,2 milliard d’euros sur six ans, en faveur des entreprises industrielles porteuses de projets créateurs d’emplois. Elle s’apprête aussi à créer un « club d’entreprises pour la relocalisation » et une marque « Auvergne-Rhône-Alpes ». Stéphanie Pernod, première vice-présidente, déléguée à l’économie, nous explique les fondements de cette politique de souveraineté.
Plus de 400 entreprises ont posé leur candidature pour bénéficier du Plan régional de relocalisation. Une centaine a été retenue. Quels sont les critères qui guident vos choix ?
Stéphanie Pernod : Les candidats doivent remplir un dossier disponible sur le site Web de la Région ou auprès de nos agences. Les projets sont examinés une fois par quinzaine par un Comité de relocalisation que je préside et qui décide si, oui ou non, les demandes sont éligibles. Nous soutenons les entreprises qui investissent dans un outil productif nouveau, développent leurs activités et créent de l’emploi. Cette aide n’est pas seulement un soutien financier. Elle donne droit à un accompagnement individualisé, si nécessaire, en matière de ressources humaines, d’ingénierie de projet, d’accompagnement à l’international…
Certaines filières industrielles sont-elles prioritaires ?
Stéphanie Pernod : La priorité est de ramener en Auvergne-Rhône-Alpes des productions qui ont été délocalisées ; et de développer de nouvelles lignes de production dans des entreprises présentes en région. Bien sûr, nous connaissons les points forts de l’industrie régionale, comme la santé, le textile ou encore la métallurgie. Mais les aides que nous apportons doivent répondre à une logique économique, au cas par cas : les projets sont-ils viables ? C’est ainsi que nous avons refusé d’aider un projet de fabrication de masques sanitaires FFP2 car ce n’était pas le cas : une telle production n’a aucune chance, selon nous, d’être concurrentielle.
Un emploi industriel en génère trois dans les services.
Qu’est-ce qu’une souveraineté régionale ?
Stéphanie Pernod : Il s’agit d’aider nos entreprises industrielles à investir, innover, développer leur activité en France et à l’international, de façon à être en capacité de mieux tenir face aux crises ou pandémies qui peuvent arriver. L’industrie tient tout : un emploi industriel en génère trois dans les services. Le secteur des services fonctionne quand l’industrie va bien.
Pourtant, l’industrie n’a cessé de décliner en France…
Stéphanie Pernod : Pendant trente ans, des pans entiers de l’industrie ont disparu car on a pensé que l’Eldorado était d’aller produire moins cher ailleurs et qu’on allait prospérer sur les services. Le coût élevé du travail en France a été un handicap pour conserver nos activités industrielles. Dès 2015, Laurent Wauquiez a été le seul homme politique à vraiment axer sa politique sur le soutien de l’industrie. J’ajouterai que notre soutien à l’industrie a un effet écologique important : produire en Auvergne-Rhône-Alpes, c’est éviter la pollution due au transport des marchandises qui sont fabriquées ailleurs, dans des conditions parfois douteuses.
La Région a créé un fonds souverain. Dans quel but ?
Stéphanie Pernod : Ce fonds souverain s’élève aujourd’hui à près de 100 millions d’euros : 30 millions apportés par la Région et 70 millions par un pool bancaire. Il s’agit d’entrer au capital d’entreprises régionales quand elles ont besoin d’apports de capitaux. Nous avons annoncé que ce fonds allait être ouvert à l’épargne des particuliers. L’idée est d’attirer, sur un placement à long terme, l’épargne des gens qui auraient envie d’investir dans des entreprises régionales. Grâce à ce fonds, ils sauront où va leur argent, c’est une première en France.
Cet article a été publié dans le numéro spécial 2500 de Bref Eco.