L'un des objectifs de Tremplin et Cauriss : ramener du travail de confection textile en France
Cécile Gerbe-Servetaz
En plus de 35 ans, l'association Tremplin (intégrée aujourd'hui au groupe Cauriss) est devenue une entreprise dynamique de la réinsertion sociale et professionnelle, et un champion du recyclage, du réemploi, et du maraîchage bio.
En juin, un magasin inédit a ouvert au cœur de Bourg-en-Bresse dans le nouveau centre commercial du Carré Amiot. Il s'agit d'une friperie, exploitée par Tremplin, acteur de la réinsertion sociale. Dans cette boutique de 100 m², les clientes et clients peuvent acheter des vêtements vintage « de qualité » à des prix imbattables. « Cette offre concept store casse les codes de l'insertion, en l'amenant en plein centre-ville », déclare le directeur de l'association, Martial Do, avec le langage du chef d'entreprise moderne. Tremplin a répondu à une sollicitation de la mairie de Bourg-en-Bresse désireuse d'avoir une offre de l'économie sociale et solidaire dans ce quartier « bo-bo ». Une sacré reconnaissance, 35 ans après la création aux confins de la ville, du premier atelier de « réentrainement au travail », employant des cabossés de la vie, au tri de vêtements collectés sur des points de dépôts volontaires. Dans un département de l'Ain frôlant le plein emploi, l'association travaille toujours avec un public en grande difficulté.
Accélération massive
Aussi symbolique qu'il soit, ce magasin « de luxe » n'est qu'une pierre de l'imposant édifice entrepreneurial qu'est devenue l'association. Tout s'est accéléré ces huit dernières années : le budget est passé de 4 millions d'euros à plus de 14 millions, le nombre de salariés, de 50 à 350 (dont 150 permanents). Depuis 2020, l'ensemble des structures et leurs activités - travail, logement, hébergement, santé et accompagnement - sont reunies dans un groupe : Cauriss. Il fonctionne comme une holding. Sans perdre son âme. « Notre défi, explique Martial Do, est de produire de la richesse économique en parallèle de la richesse sociale. Chez nous, l'essentiel de la valeur ajoutée repart dans le projet social ».
Textile, ressourcerie, légumes bio
La branche textile est prédominante, avec quelques 1.300 tonnes collectées par an grâce à une logistique propre. Avec un taux de déchets de 7 %, ces volumes de vêtements et linges de maison sont, soit recyclés (coton, laine), soit réemployés après retouches dans un atelier de couture, et vendus dans deux magasins exploités en propre, l'un de 800 m² à Bourg-en-Bresse, l'autre de 200 m² à Ambérieu-en-Bugey.
Recyclage et réemploi toujours, avec la branche ressourcerie fonctionnant en partenariat avec les Compagnons d'Emmaüs. Petits et gros électroménagers, mobiliers, arts de la table, vélos, jouets, etc. : entre 250 et 350 tonnes de biens sont ainsi traitées chaque année. Et les produits, réparés et destinés au réemploi sont vendus dans deux magasins de la région burgienne.
La troisième branche de cette PME sociale, est l'alimentaire. Cauriss exploite deux fermes en Bresse et en Dombes, où sont cultivés des légumes bio. Cette production alimente des prestations de traiteur (événementiel) et de restauration collective (600 repas quotidiens livrés aux centres d'hébergement et à des clients extérieurs). L'association bénéficie d'un agrément pour la mise sous vide en barquette, et dispose d'une conserverie. Ce dernier équipement devrait permettre au groupe Cauriss de développer son activité dans le travail à façon pour écouler la production de petits producteurs bio. Martial Do et ses équipes veulent aussi développer une offre de produits maraîchers aux collectivités territoriales engagées dans des plans « alimentation durable » . « Nous voulons leur proposer des légumes bio, lavés, blanchis, coupés, prêts à être cuisinés. »
Des projets dans la métropole lyonnaise
En reprenant récemment l'atelier de menuiserie et l'atelier de couture du Grenier (autre association sociale) à Lyon, Cauriss voit encore plus grand dans son ambition de développer « une économie de rupture avec la mondialisation ». Son premier objectif serait d'ouvrir un nouveau magasin de produits de la recyclerie sur la métropole. Le deuxième serait de ramener du travail de confection textile en France, « de l'ordre de 5 à 10 % de ce qui est produit à l'étranger. Nous sommes capables de répondre aux commandes de petites séries, entre 500 et 1.000 pièces », plaide Martial Do. En 2020, l'atelier de Cauriss a prouvé sa réactivité industrielle, en participant aux côtés de la société burgienne Seven Fashion, à la confection de 45.000 masques anti-Covid.