Pas de surprise dans l’enquête annuelle de la Banque de France en ce qui concerne la région Auvergne-Rhône-Alpes. Le stop & go de 2020 a laissé la place à des perspectives de rebond pour 2021… encore floues. Et, quoi qu’il en soit, peu optimistes sur le front de l’emploi.
La direction régionale de la Banque de France a présenté les résultats de son enquête annuelle, réalisée auprès de 4 200 entreprises et établissements de la région. Tout a déjà été dit et écrit, ou presque, sur cette année 2020 qui, rappelle Christian Jacques Berret, directeur régional, a généré « la plus importante récession depuis la seconde guerre mondiale », avec finalement un PIB en baisse de 8,3 % en France.
À l’aune de l’actualité de ce début d’année, les projections de rétablissement du pays sont prudentes : la Banque de France prévoit + 5 % en 2021 puis la même chose en 2022 avant un retour à une croissance molle en 2023 (+ 2 %). Les calculs ont été réalisés sur la base de quelques hypothèses : en particulier que l’épidémie de covid ne s’aggrave pas et que le déploiement des vaccins soit effectif vers la fin 2021.
Un pic de chômage au premier semestre 2021
C’est au cours du premier semestre 2021 qu’est attendu un pic du chômage, retardé jusqu’à présent par les aides exceptionnelles de l’État aux entreprises, lesquelles ont pu retarder leurs décisions de baisse d’effectifs. La Banque de France estime que, alors qu’il était de 8,5 % début 2020, le taux de chômage va grimper à 11 % au premier semestre 2021. Et qu'il faudrait attendre 2023 pour le voir redescendre à 9 %.
Services, industrie, BTP : des évolutions contrastées en Auvergne Rhône-Alpes
En Auvergne-Rhône-Alpes comme dans le pays entier, la comparaison entre l’évolution de l’emploi et la récession donne une idée de l’effort engagée par la puissance publique pour atténuer les dégâts de la crise sanitaire devenue économique. À l’échelle régionale cette fois, le PIB a en effet chuté de 10,4 %, du jamais vu, quand la baisse des effectifs salariés n’a baissé « que » de 1,6 % !
C'est le secteur des services qui a été le plus touché (-13,2 % de chiffre d’affaires, pour des effectifs stables), avec des différences notables d’une filière à l’autre : la situation est dramatique pour la restauration et l’hôtellerie, par exemple, quand elle est tenable pour les services numériques (- 0,3 %).
La chute historique de l’industrie (baisse de 9,8 % de chiffre d’affaires et de 2,6 % pour les effectifs) est, elle aussi, contrastée : la métallurgie est à la peine (-18,5 %), de même que le matériel de transport (-17,5 %) et la plasturgie (-10 %), tandis que la pharmacie (-3,1 %) et l’agroalimentaire (-2,7 %) limitent les dégâts. L’industrie aura aussi beaucoup moins investi qu’habituellement (- 16 %).
Quant au BTP, très dépendant de la commande publique, il a souffert lui aussi, avec une chute de 7,9 % de son chiffre d’affaires pour une légère baisse (-0,5 %) de ses effectifs.
Un État endetté au cœur de la bataille économique
Le soutien de l’État s’est traduit par une autre tendance : la trésorerie des entreprises ayant été fortement soulagée par les mesures de soutien, les impayés des entreprises ont également connu une chute spectaculaire. Quant aux PGE (Prêts Garantis par l’État), Auvergne-Rhône-Alpes en a eu sa juste part : sur un total de 130 milliards accordés à l’échelle du pays, les entreprises de la région ont bénéficié de 14 milliards d’euros, soit 11 % des montants, le poids exact de son économie dans le PIB national.
Cet effort considérable de l’État et son endettement font aujourd’hui débat. « Il va falloir prendre le chemin du désendettement », dit Christian Jacques Berret qui tient à faire la différence entre la dette générée par le covid et une dette plus structurelle. « Il faut se souvenir que la dette publique était de 20 % du PIB en 1980, de 60 % en 2000 et qu'elle avait déjà atteint 98 % du PIB en 2019. Elle passera 120 % en 2022 ».
Qui va payer cette dette ? Pour l’instant, pas de réponse. Ou plutôt, beaucoup… plus ou moins contradictoires.
Christian Jacques Berret réagit au moins à l’une des hypothèses avancées aujourd’hui par certains économistes : « L’idée d’une suppression possible de la dette publique est un fantasme. Cela a déjà existé dans certains pays et on en a vu toutes les conséquences négatives. Depuis deux siècles, la France a toujours honoré sa dette. Si ce n’était plus le cas, les prêts contractés par le pays seraient beaucoup plus chers ».