Raphaël Appert, directeur général du Crédit Agricole Centre-Est : "Les collaborateurs sont la plus grande richesse de l’entreprise".
Bertrand Gaudillère / item
Créé au XIXe siècle comme beaucoup d’autres grandes banques, le Crédit Agricole est l’archétype d’une entreprise du « temps long ». Raphaël Appert, directeur général du Crédit Agricole Centre-Est, nous en explique les ressorts.
Difficile de résumer la longue histoire du Crédit Agricole…
Raphaël Appert : La première caisse locale du Crédit Agricole est née en 1885 à Salins-les-Bains, dans le Jura, du regroupement d’agriculteurs visionnaires qui ne trouvaient pas d’autres moyens de financer leur activité. En 1894, un ministre de l’Agriculture, Jules Méline, signera l’acte de naissance officiel du Crédit Agricole. Puis, en 1920, est créé l’Office national du Crédit Agricole, l’ancêtre de Crédit Agricole SA. Pendant les deux décennies qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, le Crédit Agricole a contribué à la reconstruction et la modernisation du pays.
Les années 1960, 70 et 80 ont été celles du décollage commercial. Les Français sont alors nombreux à ouvrir un compte. Les fonctions du Crédit Agricole vont s’élargir et, dans les années 1980, il a toutes les compétences d’une banque universelle. 1988, c’est la date du rachat à 100 %, par les Caisses régionales, de la Caisse Nationale qui deviendra Crédit Agricole SA.
Que vous inspire l’observation de cette très longue période ?
Raphaël Appert : Il a fallu s’adapter en permanence, faire évoluer le modèle, enrichir nos métiers : de banque agricole à banque universelle, assureur (Prédica, Pacifica), conseil en épargne (Amundi), sans oublier le crédit à la consommation (Sofinco) ou l’immobilier (CA Immobilier). Une entreprise doit vivre avec le sentiment qu’elle peut disparaître demain tout en se projetant sur le long terme. Elle doit saisir les opportunités, être agile. Ainsi le Crédit Agricole Centre-Est a investi 100 millions d’euros dans la rénovation de deux tiers de ses 300 agences en cinq ans, parce que la proximité reste au cœur de la relation avec nos clients. Si l’on n’avait pas bougé, nos agences seraient devenues des musées : respecter le temps, ce n’est pas entretenir des musées !
Nous n’avons pas de stratégie d’optimisation financière qui exclurait certaines zones moins rentables que d’autres
Les caisses régionales, comme le Crédit Agricole Centre-Est, sont autant de banques de plein exercice, dans un schéma très décentralisé…
Raphaël Appert : Chacune des 39 caisses régionales est dédiée à un territoire qu’elle s’engage à servir. Ainsi, aucune partie de ce territoire n’est laissée de côté : pour le Crédit Agricole Centre-Est, par exemple, le bassin du Creusot est aussi important que le Pays de Gex. Nous n’avons pas de stratégie d’optimisation financière qui exclurait certaines zones moins rentables que d’autres, comme c’est le cas d’autres banques qui les ont désertées.
Concrètement, comment cela se traduit-il ?
Raphaël Appert : D’abord dans une relation clients de long terme. Nous cherchons à entretenir avec eux une relation de qualité et de satisfaction qui dépasse la simple relation transactionnelle. D’ailleurs, nos deux indicateurs les plus importants sont l’évolution du nombre de nos clients, révélatrice de notre attractivité, et l’indice de recommandation par nos clients (sont-ils prêts à nous recommander ?), remis à jour tous les ans.
Pourquoi reconstruire votre siège social de Champagne-au-Mont-d’Or ?
Raphaël Appert : Ce chantier est un investissement pour plusieurs décennies, il traduit une vision d’avenir. Nous sommes arrivés à Champagne en 1986. Mais nous avons changé d’époque et il fallait répondre à de nouveaux enjeux en cohérence avec nos valeurs et nos engagements.
Engagements environnementaux d’abord. Nous reconstruisons sur les bâtiments historiques qui étaient encore très sains. 95 % des matériaux enlevés seront recyclés. Et Terralumia (le nom du nouveau campus, NDLR) aura une consommation d’énergie considérablement diminuée (photovoltaïque, isolation, géothermie, raccordement au réseau de chaleur local).
Engagements sociaux ensuite. Les collaborateurs sont la plus grande richesse de l’entreprise. Nous recrutons près de 200 personnes chaque année (sur un effectif global de 3.000 salariés, NDLR) en CDI. C’est sur les équipes que repose la culture d’entreprise. À long terme, l’objectif est de permettre à nos collaborateurs d’évoluer vers des métiers différents, de leur proposer des possibilités d’épanouissement et d’élévation de leurs compétences… Intégrer la RSE dans nos stratégies est une opportunité majeure de développement et de création de valeur pour nos équipes.
Cet article a été publié dans le numéro spécial 2500 de Bref Eco.