Julien Fialletout, associé du cabinet Germain Maureau.
A l'occasion de la Journée mondiale anti-contrefaçon, Julien Fialletout, associé du cabinet lyonnais Germain Maureau, spécialisé en propriété intellectuelle, livre dans cette tribune son point de vue sur l’impérieuse nécessité des mesures anti-contrefaçon pour préserver la compétitivité des entreprises innovantes. A l’heure du Covid-19, des escroqueries ont bien entendu concerné la vente sur internet de faux dispositifs médicaux, médicaments et autres tests de dépistages…
Nos comportements d’achat évoluent, indéniablement. La crise sanitaire a accéléré davantage encore l'essor du e-commerce. Le dernier sondage Odoxa indique que durant le confinement, près d’1 Français sur 2 a commandé des produits en ligne ou via des applications mobiles. Aujourd’hui 96 % d’entre eux affirment vouloir poursuivre leur usage du e-commerce (*).
Internet est incontestablement le marché le plus prisé des contrefacteurs
Sans même évoquer ici les problématiques du « dark web », Internet est incontestablement le marché le plus prisé des contrefacteurs en tout genre. Quand la mondialisation facilite les échanges, elle augmente indubitablement les pratiques illicites : en 2019, les services douaniers ont intercepté plus de 700.000 articles contrefaisants. La contrefaçon représenterait, selon une enquête de l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) (*) de mars 2019 pas moins de 3,3 % des échanges mondiaux. Au niveau de l'Union européenne (UE), 6,8 % des importations en provenance du reste du monde seraient des contrefaçons.
En matière de marques ou dessins et modèles, la contrefaçon concerne la reproduction ou l’imitation, sans l’autorisation de son propriétaire. Sont sanctionnables, l’importation, la commercialisation, la détention de produits contrefaisants.
Elle touche tous les secteurs d’activité (maroquinerie, horlogerie, parfums, vêtements, jouets, cosmétiques, tabacs, produits électroniques, logiciels, médicaments etc.). A l’heure du Covid-19, des escroqueries ont bien entendu concerné la vente sur internet de faux dispositifs médicaux, médicaments et autres tests de dépistages…
Développer des solutions de veille
Si l’évolution de nos modes de consommation implique une évolution des actes de contrefaçon, elle rend également impératif le développement de solutions de veilles permettant d’endiguer rapidement ce fléau.
Les impacts de la contrefaçon sont multiples, tant du côté des consommateurs que des entreprises. Le premier facteur de risque concerne les risques sanitaires et la sécurité des consommateurs ; l’utilisation de produits contrefaisants pouvant s’avérer dangereuse. D’un point de vue économique, la contrefaçon porte atteinte à l’image comme à la compétitivité de l’entreprise : elle induit une appropriation indue des investissements en R & D ou en marketing. Elle est dans le même temps responsable des pertes de chiffres d’affaires, chutes de productivité, réductions des effectifs et délitement du savoir-faire, sans parler de la dégradation de l’image de marque.
Très mobilisée sur le sujet, l’Unifab (Union des Fabricants) agit pour le compte des industriels. Elle travaille à faire évoluer la législation et interpeller les pouvoirs publics avec un souci majeur, celui de préserver la propriété intellectuelle et la valeur de l’innovation, deux points stratégiques pour l’économie du pays.
L’an dernier, une enquête de l'Office de l'Union Européenne pour la Propriété Intellectuelle annonçait des pertes de l’ordre de 7 milliards d'euros pour la France avec des impacts non seulement en termes de volume de ventes mais également d’emplois.
Les enjeux de la digitalisation
En tant que spécialistes de la propriété intellectuelle, nous développons des solutions de veille qui permettent de lutter contre la contrefaçon, défendre la propriété industrielle de nos clients en les aidant à préserver leurs innovations et leur capital de marque.
La contrefaçon s’invite sur tous les réseaux sociaux (notamment Instagram), toutes les plateformes ou marketplaces (Amazon), et bien entendu sites de revente de produits d'occasion (eBay). C’est à ce niveau, de l’offre (en ligne) contrefaisante qu’il est aujourd’hui indispensable d’agir. Vraies fausses photos de produits, utilisation des marques dans les descriptifs produits, tags, hashtags, site miroirs pirates, les pratiques frauduleuses sont légion.
S’il multiplie les risques d’atteintes, le digital ouvre également la voie à un nouvel arsenal anti-contrefaçon. Des solutions technologiques, des algorithmes permettent de détecter les sites ou offres douteux. Les technologies blockchain ou d’horodatage apportent leur pierre à l’édifice. Cependant, les entreprises manquent souvent de ressources internes pour effectuer cette veille, Aussi, nous avons pour ambition de développer nos services de surveillances et d’actions rapides en déréférencement (takedown) via nos plateformes dédiées ou par l’intermédiaire de notifications personnalisées.
La veille ou surveillance des réseaux est un enjeu essentiel pour détecter puis traiter la contrefaçon : il s’agit, à un premier niveau, de mettre en place des dispositifs de surveillance adaptés au web pour identifier les contenus en ligne contrefaisants.
La seconde étape concerne la coordination des enquêtes sur sites : collecte d’informations pertinentes, identifications des cibles, conservation des preuves jusqu’à l’intervention pour les opérations de saisie et de destruction des produits contrefaisants.
La lutte anti-contrefaçon s’adapte. Cette agilité est une bonne nouvelle… mais le chemin est encore long. La pédagogie et la communication sur ce sujet, ses risques et ses enjeux restent indispensables. C’est l’objectif de la journée anti-contrefaçon organisée annuellement en juin depuis 1998 pour sensibiliser le grand public aux conséquences de la contrefaçon.
Enfin, en cette période cruciale de relance économique, la lutte anti-contrefaçon fait partie des enjeux stratégiques pour la sauvegarde des investissements et la préservation des savoir-faire de nos entreprises.
Tribune rédigée par Julien Fialletout, associé du cabinet Germain Maureau
(*) Source Etude Odoxa L’utilisation des technologies et du numérique pendant et après le confinement – Mai 2020
(*) Source enquête OCDE et EUIPO –douane.gouv.fr - 2019