Guillaume Bourdon, président de Second Souffle; Marie-Josèphe Laurent, Bâtonnière de Lyon; Thierry Gardon, président du Tribunal de commerce de Lyon; et Odile Dubreuil, présidente régionale de l'Ordre des Experts-Comptables.
A.R.
Le remboursement des premiers PGE (Prêts Garantis par l'État) débute et les Urssaf réclament les dettes sociales tandis que les chiffres d’affaires ne sont pas forcément au rendez-vous et que la facture énergétique explose. Relancée, l’opération Bol d’Air entend prévenir les difficultés des entreprises.
À l’instant t, les chiffres ne sont pas si mauvais. La grande catastrophe annoncée ne se lit pas encore dans les données brutes du Tribunal de commerce de Lyon. « Fin septembre, nous comptabilisions 880 entreprises en procédure collective contre 1 400 à la même époque en 2019 », indique Thierry Gardon, son président. Le reflux devrait cependant prendre fin puisque les aides d’État ont quasiment disparu et que les factures vont arriver.
Odile Dubreuil, présidente de l’Ordre des experts-comptables Auvergne-Rhône-Alpes indique que le remboursement des premiers PGE débute et que les cotisations sociales, automatiquement suspendues à une époque, sont maintenant dues… et qu’elles s’ajoutent à celles de l’année en cours. Bref, le mur de dettes annoncé arrive et les difficultés de remboursement vont apparaître.
Générer une croissance de 8 % de son revenu net avant impôt pour faire face
Des difficultés majeures, à en croire Thierry Gardon, inquiet : « lorsque l’on a emprunté 25 % de son chiffre d’affaires à rembourser sur quatre ans, il faut générer une croissance de 8 % de son revenu net avant impôt pour faire face ». Beaucoup d’entreprises n’auront pas cette chance. D’autant qu’elles devront aussi payer leur dette sociale voire fiscale. S’ils sont possibles, ces remboursements obéreront de surcroît les capacités d’investissement des entreprises. D’autant qu’elles vont aussi devoir faire face à l’augmentation conséquente des tarifs de l’énergie.
Ces paramètres ont conduit l’ordre des avocats, l’ordre des experts-comptables, le tribunal de commerce et l’association Second souffle à relancer l’opération Bol d’air mise en place durant le Covid et qui n’avait pas trouvé son public puisque des aides avaient été mises en place.
Surveiller sa trésorerie
Le dispositif s’adresse aux chefs d’entreprise qui se sentent en difficulté. L’idée est de tirer la sonnette d’alarme le plus tôt possible, sans attendre d’être au bord du gouffre. « Je dirais que le critère, c’est l’état de la trésorerie », commente Thierry Gardon. L’entrepreneur peut donc appeler le0801 280 250 pour trouver aide psychologique et technique. Des chefs d’entreprises bénévoles de l’association Second Souffle sont au bout du fil pour proposer des rendez-vous physique (les 3ème jeudi de chaque mois). Après un premier entretien, ils orienteront le demandeur vers un ou des interlocuteurs techniques.
Une banque peut abandonner une partie de sa créance…
Ces interlocuteurs analyseront l’état de l’entreprise, son activité, sa dette, établiront un prévisionnel de trésorerie, s’interrogeront sur la capacité et la volonté de l’entrepreneur à modifier son business model. « Si ça vaut le coup, il s’agira ensuite d’aller devant le tribunal de commerce pour lancer une procédure amiable », explique Thierry Gardon. Car « des solutions existent », martèle Odile Dubreuil.
L’idée sera d’organiser une sorte de redressement judiciaire amiable avec un échelonnement des dettes Urssaf et des dettes bancaires voire un effacement. « Une banque qui voit un business model cohérent peut abandonner une partie de sa créance pour ne pas tout perdre », indique encore le président du tribunal. Lui-même chef d’entreprise, Thierry Gardon connaît les difficultés des dirigeants. Mais il les exhorte à ne pas pécher par orgueil ou faux espoir.