Les site de SaintJean Industries Poitou emploie 330 personnes.
Le fabricant de culasses pour moteurs Saint Jean Industries Poitou est à bout de souffle. Face à la chute des commandes de son client Renault sur les culasses diesel et à son incapacité industrielle à trouver de nouveaux clients, l’entreprise a été mise par sa maison mère sous la protection du tribunal de commerce de Lyon.
Lorsque Saint Jean Industries a repris le fabricant de culasses pour moteurs de voitures d’Ingrandes-sur-Vienne en 2012 à la barre du tribunal de commerce, son plan prenait en compte un volume d’achat annuel de 1 million de culasses par son client (presque unique) Renault. Problème : ce volume n’a jamais été atteint. A la faiblesse initiale de la commande s’est ajouté le diesel-gate et la désaffection pour les moteurs diesel. « En 2017, nous n’avons fabriqué que 740.000 culasses et cette année, nous allons finir sur 692.000 unités », indique Pierre Ansay, directeur du site. Sur l’ensemble, c’est uniquement la quantité de culasses diesel (40 % de la production cette année) qui diminue et qui n’est pas compensée par une augmentation des culasses pour véhicules essence.
Le groupe a injecté du cash jusqu’à maintenant mais nous ne pouvons plus
« Les deux principaux fournisseurs de culasses de Renault sont Némak et Linamar », précise Hervé Véricel, directeur commercial du groupe. « Nous sommes tout petits et ne sommes considérés que comme une variable d’ajustement », soupire Pierre Ansay. Hervé Véricel concède cependant que Renault a essayé de faire des efforts sur les volumes, sur les prix ou sur des commandes d’autres produits. « Cela n’a pas suffi. Le groupe a injecté du cash jusqu’à maintenant mais nous ne pouvons plus », indique le directeur commercial.
D’où la cessation de paiements pour cette entreprise qui emploie en moyenne 330 personnes et qui a réalisé en 2017 un chiffre d’affaires de 58 millions d’euros. « Sans une garantie de volumes de la part de Renault sur le long terme, nous ne voyons pas de solution », déclame encore Hervé Véricel.
Un changement de technologie impératif ?
Car un volume de commandes suffisant aurait deux vertus. Celle de poursuivre l’activité. Mais surtout, celle de pouvoir investir dans l’outil de production afin de préparer l’avenir. Propriété de Renault jusqu’en 2000, l’entreprise a toujours fabriqué des culasses selon le procédé dit « basse pression » utilisé uniquement par le constructeur au losange. Ce qui rend impossible le démarchage d’autres clients.
Lors de la reprise en 2012, le plan de Saint Jean Industries prévoyait 24 millions d’euros d’investissement dont 12 millions issus du Fonds de modernisation des équipementiers automobiles, le reste devant être apporté par Renault et par le repreneur. « Nous avons injecté 12,5 millions mais le reste du financement n’est jamais arrivé », annonce pudiquement Hervé Véricel. Conséquence : l’entreprise n’aurait pas eu les moyens de moderniser sa ligne de production ou de se diversifier. L’idée était de passer à la technologie dite en coulée gravité (meilleure qualité) imposée par tous les autres constructeurs. La transition n’a pas été faite et l’avenir de l’entreprise débouche aujourd’hui sur un point d'interrogation.