Pierre Gattaz et Laurent Fiard (président du Medef Lyon-Rhône).
© Fabrice Schiff
Le président du Medef était invité, le mardi 4 avril, au Printemps des entrepreneurs de Lyon. Intervention attendue, bien sûr, à trois semaines à peine de la présidentielle. Le public d’entrepreneurs, a priori tout acquis, n’a pas été déçu. Morceaux choisis.
Bien sûr, le propos n’est jamais ouvertement politique, le parti préféré du Medef étant… celui des entreprises, comme le veut la posture. Mais à un peu moins de trois semaines de la présidentielle, Pierre Gattaz s’est lâché.
Présidentielles : deux candidats
« Les programmes de Mélenchon, Le Pen et Hamon sont antiéconomiques : ce sont des gens qui n’aiment pas l’entreprise ( Le FN, en particulier, constitue un vrai danger. Son programme, avec une retraite à 60 ans, générerait une fiscalité écrasante. Quant à la sortie de l’euro, elle serait catastrophique. On irait vers une situation « à l’Argentine » pour quinze ans ! Le problème, ce n’est pas l’euro, ce sont les charges sociales et fiscales qui pèsent sur les entreprises ».
« Deux candidats vont dans le bon sens, sur le plan économique. François Fillon a le programme économique le plus abouti, qui pourrait nous ramener à la croissance. Macron assume l’entreprise mais ne va pas jusqu’au bout, notamment sur la baisse des charges et du coût du travail ».
Industrie et mondialisation
« Pour l’industrie, il nous faut une vision à 30 ans. L’industrie doit passer de 12 % du PIB aujourd’hui à 15 % en 2020 puis à 20 % en 2030. Cela a été une grave erreur d’opposer industrie et services. Les deux sont indispensables et très dépendants l’un de l’autre ».
« Par ailleurs, l’industrie ne peut pas se passer de la mondialisation, essentielle en cela qu’elle apporte des marchés et des clients. Et regardez les ETI qui réussissent grâce à la mondialisation : elles recréent des emplois en France ».
« Le monde est à équiper. Quand je vais en Chine, les Chinois me disent : votre pays est formidable mais vos entreprises, on ne les voit pas chez nous. En Malaisie, à Singapour, etc., c’est pareil. En Afrique, nos parts de marché sont passées de 10 % à 5 %. Or, ce continent va passer de 1,2 milliard d’individus à 2 milliards en 2050. L’Afrique a un taux de croissance moyen de 5 %. Et 40 % des Africains parlent le français ».
« Il faut y croire. La France a des filières d’excellence sur lesquelles elle peut s’appuyer : nanotechnologies, biotech, énergie, environnement, santé, ville durable, infrastructure, tourisme, agroalimentaire… : nous avons des atouts fantastiques. Notre créativité est immense et admirée de tous. Nous avons les meilleures écoles de mathématiques, par exemple. Nous pouvons revenir au plein-emploi : l’emploi, c’est la dignité, l’épanouissement, le pouvoir d’achat ».
La culture de l’entreprise, du collège à l’assemblée nationale
« Dès le collège, il faut enseigner l’économie de l’entreprise, le commerce, apprendre ce qu’est l’économie de marché : des recettes, des dépenses, des loyers, des dettes, une marge… Ça fait 4 000 ans que le monde marche comme ça !»
« Par ailleurs, tous ceux qui veulent accéder aux grandes fonctions de l’Etat devraient faire des stages en entreprises. Qu’on soit député, sénateur ou ministre, il faudrait passer un an ou deux en entreprise ».
« Il faut accepter la réussite. On est très content de voir une équipe de foot, de rugby ou de tennis qui gagne. Mais il faut aussi célébrer les réussites économiques, scientifiques, financières… ».
Une économie humaine
« Je crois à une économie française profondément humaine et respectueuse de l’environnement. Le Medef est toujours caricaturé comme représentant le CAC 40, de gens gavés de dividendes, avec de l’argent partout, les cigares dans la poche : c’est grossier, grotesque. Je n’aurais pas conservé cinq usines en France si je me comportais comme un salopard (8) avec mes salariés. Les salariés sont les éléments les plus précieux de l’entreprise. On sait bien que sans eux, ça ne marche pas longtemps. Il faut, pour la France, non pas une économie à l’anglo-saxonne, plus brutale, mais une économie profondément humaine et respectueuse de l’environnement ».
Moins de lois
« En France, nous croulons sous les textes et les lois qui se sont accumulées au fil des années. On pourrait s’inspirer de pays étrangers pour alléger un peu le poids de la législation sur les entreprises. En Grande-Bretagne, quand on crée une loi, on en enlève deux autres. Les Canadiens ont inventé, eux, les lois à durée limitée : au bout de cinq ans, certaines lois tombent automatiquement. Si elles sont bonnes, il faut alors faire l’effort de les actualiser ».