Stéphane Currenti, délégué régional de l’Apec Auvergne Rhône-Alpes.
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En ce début d'année, nous vous proposons une série d'interviews de décideurs économiques de la région sur leurs espoirs et visions pour 2024. Aujourd'hui, rendez-vous avec Stéphane Currenti, délégué régional de l’Apec Auvergne Rhône-Alpes, qui qualifie de « très dynamique » le marché de l’emploi des cadres même si un ralentissement de la croissance semble intervenir en 2024. Stéphane Currenti estime que les cadres d’aujourd’hui, même s’ils mettent encore la rémunération comme principal critère de choix, aspirent à trouver une utilité dans les missions des postes proposés.
Bref Eco : Quelle est la photographie 2023 de l’emploi des cadres dans la région ?
Stéphane Currenti : La photographie d’avril 2023 montre que la région compte 456.000 cadres en emploi et 48.000 cadres en recherche d’emploi, soit un taux de chômage des cadres de 9,5 %. Il n’y a pas eu de changement majeur depuis. Entre avril 2022 et avril 2023, nous avons constaté une très grosse dynamique avec un volume de recrutement de 32.800 personnes (dont 8.100 promotions et 9.270 créations de postes, en CDI et CDD de plus d’un an). Les trois bassins les plus dynamiques sont le Rhône, l’Isère, la Haute-Savoie. Ceci est lié à la présence d’industries. 25 % des cadres auralpins travaillent dans l’industrie contre 17 % ailleurs. Mais c’est aussi le fait des services à haute valeur ajoutée comme les activités juridiques et comptables, la banque assurance, l’ingénierie-R&D, le conseil informatique et la communication. Ensemble, ces deux pans de l’activité représentent 64 % des cadres en emploi. Enfin, c’est aussi le fait de la présence de nombreuses ETI, très pourvoyeuses d’emplois.
Ce volume de 32.800 emplois marque-t-il une progression ?
S.C. : Oui, c’est 13 % de plus que le volume connu avant crise, en 2019, qui était déjà à un niveau élevé. Et c’est une progression qui n’est pas générale car, au niveau national, c’est seulement 2 %. Non seulement il y a beaucoup d’offres en Aura mais il y a aussi beaucoup de mobilité ce qui n’est pas forcément le cas ailleurs. Dans certaines régions, les offres ne sont pas pourvues faute de mobilité. En Aura, ce phénomène se limite aux métiers en tension comme dans l’informatique où les recrutements sont très difficiles, même en augmentant les salaires. Dans certains cas, les entreprises doivent recruter des profils un peu différents de ceux recherchés et les former. C’est l’une des tâches de l’Apec que de les accompagner dans ce genre de projets. C’est vrai dans l’informatique mais aussi dans le bâtiment et la comptabilité.
Comment s’annonce 2024 ?
S.C. : On constate un léger ralentissement. Mais quand je dis ralentissement, c’est un ralentissement de la croissance du nombre d’offres qui devrait tout de même atteindre presque 10 %. Ainsi, on anticipe un volume de 35.000 offres. La majorité des entreprises envisagent de recruter un cadre et 75 % anticipent des difficultés. Ça reste élevé. Elles craignent de ne pas pouvoir recruter les bonnes personnes pour s’adapter à l’arrivée de l’intelligence artificielle et aux exigences de la transition écologique et énergétique.
Et quelles sont les préoccupations des cadres ?
S.C. : Elles se recoupent en partie : la réforme des retraites, l’IA et la transition.
Quid de la marque employeur ?
S.C. : C’est devenu un critère de choix pour les cadres. La rémunération est toujours importante mais des critères autrefois en fond de queue sont remontés de manière spectaculaire : l’impact social et environnemental de l’entreprise, les conditions de travail et l’utilité des missions du poste. Ce dernier critère est une grande nouveauté. On constate que le « travailler » est une notion qui change et les entreprises doivent s’adapter pour capter les talents. L’effort est différent selon les secteurs évidemment. Dans la chimie, le travail à réaliser sur la marque employeur est beaucoup plus grand !
L’APEC (ASSOCIATION POUR L’EMPLOI DES CADRES)
L’Apec est une organisation paritaire dont le rôle est d’aider les cadres et les jeunes diplômés de l’enseignement supérieur dans leur recherche d’emploi ou de reconversion ; mais aussi d’aider les entreprises dans un contexte de difficultés de recrutement. En Auvergne Rhône-Alpes, l’Apec compte 97 collaborateurs dans 7 centres. Elle accompagne 26.000 personnes et 3.400 entreprises par an.
Cet article est issu de notre hebdo n°2564, à retrouver ici.