Numéro SPECIAL BOURG-EN-BRESSE (paru le 28/03/2012). 

Il est de bon ton, dans certaines sphères régionales, a fortiori vu de l’intérieur du périphérique lyonnais, d’attribuer à l’Ain, et par voie de conséquence à son chef-lieu, une image définitivement rurale dont l’emblème ne serait autre qu’un gallinacé, fût-il d’excellence, puisqu’il est le seul au monde à porter plumage et cocarde tricolores républicains. 

Rien n’est plus faux. Territoire largement rurbain, l’Ain est, faut-il le rappeler, le premier département industriel de France au regard du rapport (32 %) entre les effectifs industriels et le total des salariés. Même s’il n’échappe pas aux chocs d’une mondialisation prédatrice et parfois inconsidérée (ex : Lejaby), même s’il suit les courbes nationales, le chômage, depuis toujours, y sévit nettement moins qu’ailleurs, preuve de la capacité entrepreneuriale de ses acteurs, comme de la souplesse, de la densité et du maillage du tissu économique local.

Ville administrative, et flashée comme telle, Bourg-en-Bresse n’échappe donc pas au syndrôme général, avec cette particularité qui veut que la qualité de vie que l’on y trouve tendrait à porter sur l’indolence et une forme de repli jalousement préservé. Erreur profonde : la vie économique et industrielle du bassin de vie le cède à peine au mouvement perpétuel des presses de la Plastics vallée. Le territoire bressan est un territoire véritablement industriel dont l’activité est largement ancrée dans la métallurgie (travail du fil) et la mécanique, la carrosserie industrielle (Bourg est le premier pôle carrossier de France), l’agroalimentaire (travail de la viande, bovins et volailles, du lait, fabrication de plats cuisinés) et le négoce. Avec le groupe Bernard (Bref n° 2066), le chef-lieu héberge aussi la première entreprise privée de l’Ain et la deuxième de France dans sa spécialité (distribution automobile). Enfin, le bassin jouit d’une position exceptionnelle avec une desserte d’infrastructures sans aucune mesure avec d’autres territoires de son acabit.

Le chef-lieu de l’Ain souffre sans doute de la faiblesse de sa taille, au regard des autres métropoles d’équilibre régional, et de son incapacité à amalgamer un département dont les frontières, poreuses, résistent mal aux influences centrifuges des voisins (Lyon et Genève en particulier). Enfin, le tempérament local, qui connaît bien les fruits de sa terre, lui, incline plus à faire qu’à dire ce qu’on fait.

Tout l’enjeu des prochaines années sera de rendre le territoire attractif, par le renforcement des services indispensables au développement économique, la densification de la capacité industrielle et la formation professionnelle supérieure, sans altérer l’organisation et la qualité de la vie. Restera l’image. Au fond, le bassin de Bourg-en-Bresse illustre assez bien cette pensée de Pierre Dac : “La véritable modestie consiste toujours à ne jamais se prendre pour moins, ni plus, que ce qu’on estime qu’on croit qu’on vaut, ni pour plus, ni moins, que ce qu’on évalue qu’on vaut qu’on croit”.

Laurent Guigon

Photo : ©Corinne Bertrand.