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Jeudi 01 Mai 2025

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CSRD : une opportunité de transformation pour les entreprises

Caroline Lebrard, Associée Conseil & Josselin Vernay, Associé Audit & Assurance - Deloitte.

Caroline Lebrard, Associée Conseil & Josselin Vernay, Associé Audit & Assurance - Deloitte.

Caroline Lebrard et Josselin Vernay, associés Deloitte, détaillent les points essentiels pour comprendre la CSRD, se mettre en conformité avec la réglementation et, surtout, aborder cette obligation comme une véritable opportunité de transformation de son entreprise. 

Qu’est-ce que la directive CSRD ?
Caroline Lebrard : CSRD signifie Corporate sustainability reporting directive. Cette directive européenne vise à standardiser les exigences de reporting extra-financier des entreprises. Elle remplace la norme NFRD (Non financial reporting directive) qui concernait seulement les très grandes entreprises. Cette nouvelle directive introduit des obligations de reporting détaillées et harmonisées. Elle constitue une avance significative pour la transparence des informations fournies par les entreprises. Chez Deloitte, nous avons la conviction qu’il faut l’aborder comme une opportunité de transformation plutôt que comme un cadre normatif contraignant.
Josselin Vernay : Les obligations induites par les normes CSRD prévoient quatre éléments essentiels 
– La publication des informations quantitatives et qualitatives requises en conformité avec les douze normes ESRS (European Sustainability Reporting Standards) suivant l’analyse de double matérialité
– La publication des informations requises sur la taxonomie environnementale de l’Union Européenne
– La mise en place de process pour identifier les informations à reporter
– Et à terme, le tagging digital du rapport de durabilité.
Point important pour le commissaire aux comptes, le rapport de durabilité devra faire l’objet d’une vérification et d’un rapport par un commissaire aux comptes ou un organisme tiers indépendant.

Quels sont ses points clés ?
C.L. : Nous en notons cinq. Son champ d’application est étendu à un scope d’entreprises très large. Les exigences de reporting sont renforcées pour obtenir des informations détaillées sur les dimensions environnementales (biodiversité, utilisation des ressources…), sociétales (égalité des chances, conditions de travail et respect des droits de l’homme…) et de gouvernance (rôle des organes d’administration, gestion des relations avec les partenaires commerciaux…). Ces normes de reporting communes sont développées par l’organe indépendant l’EFRAG pour assurer la comparabilité entre entreprises. Les informations fournies sont vérifiées et certifiées par un commissaire aux comptes ou un organisme tiers indépendant accrédité. Enfin, le rapport doit être publié au format numérique afin d’en faciliter son accès aux différentes parties prenantes de l’entreprise.

Qui est concerné et à quelle échéance ?
J.V. : La transposition en droit français date de décembre 2023. L’entrée en vigueur de la directive CSRD est progressive. Seront concernées en 2025, sur les comptes de 2024, les grandes entreprises dites EIP (Entreprise d’intérêt public) qui étaient déjà soumises à la directive sur la publication d’informations non financières. Puis, en 2026 (sur les comptes 2025), le champ d’application de la CSRD s’élargira aux entreprises remplissant deux des trois critères suivants : plus de 250 salariés, plus de 50 M€ de chiffres d’affaires, plus de 25 M€ de total de bilan. Enfin, à partir du 1er janvier 2026, les PME cotées en Bourse devront établir ce rapport en 2027. Il nous semble important que toutes les entreprises, même celles soumises à l’obligation à partir de 2027, puissent se préparer dès maintenant.

Comment doivent-elles s’emparer du sujet ?
C.L. : La démarche doit être menée selon trois étapes. La première étape consiste à élaborer une matrice de double matérialité, un concept introduit par la CSRD, qui incite l’entreprise à identifier les sujets majeurs et à impact pour elle et son écosystème. Ces choix doivent pouvoir être expliqués à un tiers. La deuxième étape est une analyse d’écarts entre les données dont elle dispose et celles qu’elle devra reporter demain. Enfin, elle devra écrire sa feuille de route et énoncer les actions à mettre en place pour réaliser ce reporting. Et là, le vrai projet commence puisqu’il revient alors à l’entreprise de mettre en place les processus et systèmes pour permettre le reporting.

Quel sera le rôle du commissaire aux comptes ?
J.V. : Le régulateur a confié la mission de certification des informations en matière de durabilité au commissaire aux comptes. Ainsi, à compter des publications 2025, ces informations devront faire l’objet d’un rapport d’assurance limitée qui consiste notamment à vérifier le process d’identification des informations en matière de durabilité (y compris le process de double matérialité), le reporting selon les normes ESRS et le reporting taxonomie. Les informations ainsi publiées doivent donc être fiables, traçables et cohérentes pour qu’elles puissent faire l’objet de ce rapport. Le commissaire aux comptes jouera un rôle important dans la sécurisation de la trajectoire d’adoption de la CSRD.

Vous évoquez un projet transversal dans l’entreprise. Pourquoi ?
C.L. : Nous considérons qu’il faut aborder cette réglementation comme un formidable vecteur d’accélération de la transformation durable des entreprises. Dans cette perspective, toutes les parties prenantes, internes et externes, peuvent être impliquées. Par la nature même des informations à collecter, toutes les fonctions, supports et métiers, sont autour de la table pour aligner la stratégie RSE de l’entreprise. L’implication de la direction générale est un prérequis, soutenue par un binôme DAF et directeur RSE, pour mobiliser tous les acteurs internes.
J.V. : Une approche transversale sera nécessaire pour permettre la cohérence et l’intégration des pratiques de durabilité à travers les différentes fonctions de l’entreprise. Cela permet d’identifier rapidement les écarts par rapport aux attendus des normes et d’assurer que chaque département contribue non seulement à l’atteinte des objectifs de la société mais facilite également la préparation des données qui devront être publiées. Par ailleurs, du fait des informations demandées, une intégration forte entre ESG et finance est attendue, ce qui est également une attente des parties prenantes.

Quel est l’intérêt pour une entreprise de se faire accompagner dans cette démarche par un cabinet comme Deloitte ?
C.L. : Nous simplifions la procédure par notre connaissance des normes spécifiques par secteur d’activité et les bonnes pratiques. S’adjoindre les compétences d’un tiers, c’est accélérer, bénéficier de notre savoir que nous transférons à l’entreprise, disposer de méthodologies et d’outils que nous aidons à mettre en place pour assurer l’autonomie de l’entreprise dans les années suivantes.

Quel risque une entreprise prend-elle si elle ne se soucie pas maintenant de sa manière de procéder ?
J.V. : Déjà de ne pas être prête le moment où elle devra publier son rapport avec les sanctions civiles, pénales et le cas échéant administratives prévues par la Loi. Au-delà de cela, son image de marque risque d’en souffrir. Elle pourrait rencontrer des problèmes pour se financer. Des clients ou des fournisseurs, qui eux ont répondu à leurs obligations, pourraient les écarter des marchés. Ce sont le fonctionnement même et la poursuite d’activité d’une entreprise qui pourraient être remis en cause. 

 

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